22 Octobre 2015
En Algérie on transforme des sites archéologiques en gravats...Quel environnement peut-il vraiment émerger d'une telle gouvernance environnementale?
#1 Premières impressions sur le vif
Je me suis attelé ce matin à lire en détail la contribution provisoire de l’Algérie à la prochaine Conférence sur le Climat. Elle y expose ses objectifs globaux d’adaptation et d’atténuation relatifs aux « dérèglements climatiques » globaux qui seront au centre des négociations de cet évènement planétaire. Voici mes premières impressions concernant ce document officiel.
Il n’est pas inutile de préciser en premier lieu que la diplomatie algérienne joue un rôle non négligeable dans ce processus multilatéral ; car elle est également représentée par une des deux personnalités mondiales chargées de synthétiser l’ensemble des sujets de négociations internationales pour fluidifier les débats. Cette place au sein même de la synthèse, pour qui connait bien les fonctionnements de la démocratie onusienne, reste une place stratégique qui va enrichir et élargir également la vision d’Ahmed Djoghlaf. Il est, d’autant plus, déjà une éminence « verte » bardée d’un statut très influent au sein de l’ONU. Cela ne fera pas malgré tout de l’Algérie une nation incontournable dans le débat climatique, à l’instar des Etats Unis, de la Chine et de l’Europe. Mais il y a tout de même pour cette jeune nation une formidable occasion de s’affirmer comme un collaborateur africain dont le réseau diplomatique pèsera de tout son poids dans la partie Sud du globe.
La diplomatie algérienne « réaffirme [d’ailleurs], au plus haut niveau, sa volonté de ne ménager aucun effort pour le succès de la vingt et unième session de la Conférence des Parties, devant se tenir à Paris en décembre 2015 », selon les termes directement tirés de son préambule. Il faut dire que notre pays, depuis plus d’une décennie, n’a eu de cesse de tisser des liens économiques et géostratégiques avec la France et l’Europe; et ce avec un volontarisme qui me parait de plus en plus croissant. L’Algérie s’inscrit dans une politique environnementale purement universaliste et occidentale: le développement durable. Sans être péjoratif, il faut cependant le signaler pour comprendre le contexte qui semble inspirer ce document. Il n’y a pas de vision algérienne qui s’en dégage vraiment, si ce n’est sur la volonté affichée de mettre encore plus au goût du jour le GPL ; qui aura été une des grandes innovations dans l’histoire de l’indépendance énergétique algérienne.
L’état d’esprit de mon premier article sur le sujet ne sera ni celui d’une complaisance impossible à l’égard de ce document, ni d’en faire seulement une critique négative. Je ne suis pas un expert, ni capable de juger exhaustivement la pertinence ainsi que les éventuelles défaillances du projet climatique algérien. Cela demandera une enquête, longue et minutieuse pour se prononcer objectivement sur la qualité et la faisabilité de cette planification pour la période 2021-2030.
En attendant, j’aimerais déjà me permettre certaines remarques sur le vif et suggérer de ce fait quelques pistes de réflexions quant à la nature même de cette contribution. Qu’en est-il de son discours, de ses ambitions, de ses forces, mais aussi de ses faiblesses ? Est-il possible d’y déceler une vision vraiment produite par une science algérienne, un lexique vraiment propre à notre nature humaine autant qu'à notre environnement originel ; cette terre-mère-et-père qu'est pour nous l'Algérie?
J’ai dans cet exercice, surtout comme source de références une expérience très intime du terrain environnemental algérien. Elle est basée sur de nombreux témoignages, collectés depuis six ans, des visites de sites naturels ou industriels, une exploration de la sphère institutionnelle chargée de la protection de l’environnement, de la société algérienne, des actions citoyennes, du régime médiatique et politique environnemental, et de tant d’autres indices. J’ai également compilés sur mon blog des milliers d’articles rédigés essentiellement dans la presse algérienne. Certes, je ne suis pas ingénieur en environnement, ni un journaliste confirmé, mais j’ai pour principal atout dans cette entreprise un amour inconditionnel et désintéressé pour mon pays d’origine ; mon peuple, aussi, dans ses beautés naturelles autant que je ne me résigne jamais face à certaines de ses laideurs contemporaines. Car aimer est un acte total, et non totalitaire...
Ce ne sera malheureusement pas dans la critique de la Contribution Prévue Déterminée au niveau National (CPDN), que je pourrais, en toute honnêteté intellectuelle, m’aventurer à lui trouver des signes encourageants mon assentiment. Il faudra attendre d’abord de lire plus loin les détails du projet algérien dans sa partie la plus concrète et claire : celle des propositions.
La posture de notre pays semble y être, de plus, trop souvent celle d’une nation du Tiers Monde, quémandant au Nord une assistance massive. Et non l’attitude d’un pays qui aurait dû prendre le chemin de l’émergence depuis au moins quelques années. « La contribution provisoire de l’Algérie est donc soumise sous conditions de l’accès aux ressources financières extérieures nouvelles tant auprès de ses partenaires bilatéraux que multilatéraux ainsi que du transfert de technologies propres en des termes concessionnels et préférentiels et du renforcement de ses capacités techniques. »
Le style est pudique, mais l’intention est presque indéscente. Pour un pays qui a disposé de fonds colossaux durant ces dernières « dix glorieuses ». Certes, prospère surtout pour une large partie de privilégiés et d'aventuriers de tous poils. Une panacée qui a précédé un lourd tribut payé par le sang; une décennie noire des plus traumatisantes pour l’ensemble de la société algérienne contemporaine. Comment l’Algérie n’ose-t-elle pas avouer qu'elle n’a rien fait de concret pour anticiper ces changements climatiques; alors que sa diplomatie est au fait et active dans cet enjeu de développement majeur ? Depuis plus d’une quinzaine d’années déjà...
L'Algérie a été un pays pionnier, en Afrique, dans une implication multilatérale de la protection, conservation, et préservation de l'environnement. Mais il me semble que cela n'est plus vraiment le cas en lisant cet exposé insipide, qui veut dire surtout:" je n'ai rien fait...ce n'est pas de ma faute...aidez-moi à me rattrapper oh bonnes gens! " Un discours un peu adolescent qui ne fait pas honneur à la sagesse ancestrale de nos ancêtres les plus lointains et communs...De nature, les Algériens , homme ou femme, ont horreur de demander l'aumône à leurs voisins; surtout lointains. Ils préfèrent donner plutôt que de recevoir, quand ils en ont les moyens. Et comme c'est peut-être un principe de base pour eux , ils s'arrangent toujours pour avoir un plan B en cas de coups dur...
On oublie d’insister catégoriquement sur la nécessité d’une lutte sans merci contre la déforestation criminelle qui fait rage dans ce pays, d’une véritable application de ses lois environnementales revues à la hausse en matière de pénalisation, d’une politique agricole basée sur des procédés non chimiques. On ne parle et se plaint que de la fragilité de notre couverture végétale sans admettre qu’elle est surtout devenue le produit d’une gestion environnementale calamiteuse ; systémique au sein de la grande majorité de la société algérienne. De bas en haut, comme de haut en bas, le bât blesse toujours et la proue penche le plus souvent du côté de l’abîme écologique et des plus bas intérêts.
Comment, de plus, un pays peut-il affirmer qu’il n’a aucune responsabilité historique, quand il importe depuis sa création la majorité de ce qu’il consomme ? Quel est le véritable bilan CO2 et ainsi que l’empreinte écologique d’une nation dont les ports et les aéroports, mais aussi les autoroutes sont gorgées de produits en provenance de pays lointains ? Elle ne se mesure pas en Algérie, mais pèse il me semble , tout de même, sur l’ensemble du système d’émissions mondiales de CO2.
Elle est moindre, certes, que les pires...elle pourrait cependant devenir très vite conséquente et préocupante sans de véritables évolutions sociétales , plus que des transitions "vertes" . C'est du moins ce que mon simple instinct me suggère. Juste un avis...celui de l'hôte et de l'invité; d'un fils d'immigré qui a décidé de connaitre son pays d'origine en profondeur. Il y a tant de choses , à l'échelle globale, qui influent sur l'égo-système Algérie; il faut parfois sorti de la bulle algérienne pour que de nouvelles perspectives nous apparaissent.. Responsabilité donc; historique déjà...
Que dire de tous ces chantiers pharaoniques, régulièrement prétextes à des gâchis d’énergies, d’eau et de ressources naturelles ? Tous ces vices de forme qui ont coûté des tonnes considérables d’émissions de gaz à effet de serre à l’économie algérienne ? Combien de substances toxiques, polluantes et coupables de polluer notre atmosphère nationale ont été accomplis sans une réelle entrave de la part des autorités locales ou nationales ? Que va peser l’introduction du gaz de schiste dans ce bilan carbone, mais surtout la santé écologique de l’Algérie et celle des Algériens ? Quelles ressources hydriques, quels sols seront préservés quand on parle de céder à l’agriculture industrielle américaine un immense terrain d’expérimentation ? Pourquoi ne pas developper une autre façon de concevoir la nouriture; d'abord inspirée par un savoir faire local; soutenue par des procédés modernes assimilés par d'autres algériens dont beaucoup vivent en dehors de leur pays d'origine et de coeur.
Cette responsabilité climatique est non seulement de nature systémique qu'elle n’ira qu’en croissant ; à mesure que les pollueurs, les affairistes ainsi que les prédateurs de fonds publics en tous genres n’auront aucune éthique environnementale, donc aucun vrai patriotisme pour inspirer leurs entreprises de developpement seulement individuels. Elle est donc réelle et elle le deviendra encore plus à l’avenir. Nos enfants en payeront le prix...Nous aussi...Mais pas tout le monde...
Quid de toute cette absence de promotion de l’université, des sciences des climats, de l’écologie négligée? Comment devenir un jour souverain face à une gouvernance climatique mondiale de plus en plus contraignante dans ses ambitions ? Quelle vision algérienne se dégage de ce texte d'introduction? Est-elle fondée sur une synthèse de nos traditions variées poussée vers la modernité par une expertise algérienne locale et migrante? Deux pôle d'algérianité qui doivent impérativement trouver dans leur pays tous les moyens pour développer ce volet à l’échelle locale ; et non seulement globale...
Qu’est-ce qui nous prouvera que ces objectifs seront vraiment réalisés en toute bonne foi et sincérité ? Quand on sait toute la lenteur, l’immobilisme ainsi que la corruption qui gangrènent certains organismes clefs chargés d’environnement en Algérie ? Qu’ils soient étatiques, civiles ou privés ?
Pourquoi n’insiste-t-on pas non plus sur l’impuissance des politiciens et des médias algériens à stimuler une émulation nationale, ainsi qu’une approche environnementale où la société algérienne serait enfin réconciliée avec ses espaces naturels et publiques ?
Il n’y aucune vision nationale, aucune originalité, aucune critique constructive dans ce préambule indigeste qui dessert surtout de réelles propositions pertinentes. Car si j’ai été si dur avec ce début de projet ; je ne pourrais être aussi intransigeant quant à ses objectifs. Du moins si l’on accepte le fait que la question du CO2 doit primer sur toutes les autres prérogatives écologiques. Ce qui n’est pas tout à fait mon cas, et celui de beaucoup d’entre nous....
Mais, il faut également préciser, à la decharge de ce document, qu'il s'appuie sur le RAPPORT DE 2007 du GIEC; espérons que l'Algérie en profitera pour revoir sa copie; maintenant que le dernier rapport a été publié...
A suivre
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