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Nouara Algérie

ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )

Vous avez dit écologistes ?

L'Ecologie, quand ce n'est pas une science, n'est pas toujours aussi préocupée par le sort de la nature que l'on pourrait l'imaginer (Photo: Karim Tedjani)

L'Ecologie, quand ce n'est pas une science, n'est pas toujours aussi préocupée par le sort de la nature que l'on pourrait l'imaginer (Photo: Karim Tedjani)

Une des grandes incompréhensions que nous, « grand public »,  avons à propos de l'écologie, du moins  telle qu'elle est pratiquée par les militants qui s'en réclament, est que l'on nous informe si peu dans quelle échelle écologique leur activisme se situe. Parfois ce sont même ceux qui se disent écologistes qui n’ont pas vraiment conscience  de leur véritable place et rôle dans un aussi vaste écosystème sémantique et politique qu’est l’Ecologie au 21ème siècle.

Cette lacune n’est d’ailleurs pas inhérente aux médias de la société algérienne ; dans le pays où je suis né et j’ai vécu pendant une grande partie de ma vie, c’est-à-dire la France, les journalistes  ont  eux  aussi choisi d’user de  la formule « militant écologiste » comme d’un terme généraliste, pour ne pas dire  d’un « fourre-tout ».   Est-ce innocent de leur part ? Rien n’est moins sûr. Mais dans ce billet, il ne s’agira pas de chercher à comprendre les raisons ou causes d’une telle confusion des genres écologiques : plutôt de  de tenter de réparer au moins celles qui me paraissent les  plus dommageables. Notamment  pour nous aider à développer une intelligence sereine, et donc plus précise,  de ce que le mot écologiste pourrait bien vraiment signifier politiquement. 

Un environnementaliste n'est pas forcément  écologiste...

Il semblerait, en effet, en se plongeant dans la littérature dédiée à ce vaste sujet qu’est l’écologie hors de son contexte seulement scientifique, qu’il est d’emblée possible de dissocier  le militant écologiste politique de l’environnementaliste.  Bien que ces deux courants d'actions et de pensée me paraissent être les deux faces polaires d'une même idéologie, à savoir l'écologisme, elles n'abordent apparemment pas l'écologie avec une approche en tous points similaires.

L’une et l'autre n'ont pas forcement la même origine, le même discours, ni une logique  totalement compatible. Si je devais me risquer à résumer en une phrase la principale différence entre ces deux genres, ou types d’écologistes, je dirais qu’il s’agit en grande partie d’une question d’échelle de vision.

L'environnementaliste a une approche très intime avec l'idée de protection, de conservation ou de préservation de la nature; Il pense que la Terre est en danger de supporter notre espèce rendue éminemment écocidaire par le modernisme. Et qu'il est donc  urgent pour chacun d'entre nous de prendre nos  responsabilités  pour la sauver. Sa vision est avant toute morale, voire moralisatrice et n'aspire pas forcement à concevoir son action comme partie intégrante d'une idéologie  politique,  au sens autant économique (gestion de la maison) que politicienne.

L’environnementaliste  est le plus souvent actif soit à titre personnel, ou bien dans le cadre d’une action associative, institutionnelle, voire même, parfois,  à travers une activité professionnelle. Il n’a pas d’obligation de s’inscrire dans une mouvance politicienne particulière  puisque son principal centre d’intérêt est l’environnement, la nature ainsi que  sa dynamique, la biodiversité. Beaucoup  d’environnementalistes se disent  militants écologistes, sans savoir qu’ils ne le sont pas vraiment,  et  la presse entretien consciemment ou non cette erreur. Cela n'interdit pas pour autant à certains d'entre eux de participer à la vie politique. Mais, d'une manière générale, l'environnement sera leur principal cheval de bataille dans ce parcours politicien.

Les environnementalistes ont une approche très scientifiques et techniciennes de la protection de la nature, les écologistes leur reprochent même de croire que le développement durable ou le capitalisme verts suffiront à endiguer les symptômes qu'ils dénoncent. Ils ne sont pas forcement pour une révolution  de l'écologie humaine , mais plutôt une transition énergétique du capitalisme.

Beaucoup d'écologistes radicaux français, par exemple,  considèrent que  les militants d' EELV ne sont pas des écologistes, mais plutôt des environnementalistes, malgré que la presse les nomme ainsi. 

 

L'écologie politique, un socialisme du 21ème siècle ?

L'écologiste, au sens purement politique, considère qu'il est néscessaire  de remettre en question, non pas seulement notre manière de consommer, de nous comporter avec la nature, mais l'idée même de société de consommation, de productivisme centré sur l'accumulation du capital privé, au grand dam de l'intérêt publique.  Il se revendique d'une reflexion beaucoup plus radicale que les environnementalistes, ne s'inquiète pas seulement des symptômes, mais encore plus des causes de la maladie.

C'est donc l'écologie, au sens d'écosystème sociétal de l'espèce humaine dont il aspire à faire la critique,  avec pour finalité de trouver des solutions révolutionnaires pour permettre aux citoyens de passer du stade de la dépendance à la consommation,  à celui de l'autonomie de production et de penser son environnement, tout  comme les outils et instruments avec lesquels il aura le pouvoir d'interagir avec son environnement   de manière plus libre et responsable .

L’écologie politique n’est pas forcement contre la technologie, elle s’interroge surtout sur la neutralité des techniques physiques et organisationnelles qui constituent notre environnement moderne ;  elle considère même  le plus souvent la révolution numérique comme la technique  la plus à même et conviviale  de mener  chaque citoyen vers  l’autonomie  à la fois intime et collective vis-à-vis du capitalisme productiviste. C’est donc une écologie qui se veut non seulement héritière des théories de Marx, mais aussi pionnière dans leur lecture,  au regard du contexte consumériste de ces deux derniers siècles.

Beaucoup d’écologistes politiques  estiment  que l’environnementalisme n’est qu’une sous-discipline de l’écologie politique et accusent parfois les médias de mettre en avant ce dernier sous l’appellation d’écologistes, afin de réduire leur idéologie à ce qu’elle n’est pas seulement.

L’Ecosophie ou écologie profonde, une approche plus intellectuellement radicale  de l’Ecologie

Il existe également une troisième écologie, dont on a coutume de retenir de son caractère « radical », pour la taxer parfois-même  de « totalitarisme vert ». Ce courant, donc, de l’écologie « radicale » ou « profonde » parait presque à cheval entre l’environnementalisme et l’écologisme, ou écologie politique. Pourquoi ? Tout simplement parce que si elle se définit généralement elle-même comme « écocentriste », et donc très impliquée dans la relation entre l’Homme et la Nature, elle n’affirme néanmoins pas la Terre comme un organisme menacé d’extinction par l’Humanité. Bien au contraire, les tenants de l’écologie profonde ont plutôt un discours qui remet en question la pérennité de notre espèce  sur cette planète,  si elle n’apprend pas à être beaucoup moins invasive ; tant dans sa quantité, que d’un point de vue de sa qualité d’existence, de ses modes de civilisations.

Ce qui différencie l’Ecosophie, autre terme possible pour qualifier cette écologie, c’est qu’elle ne dissocie pas l’Homme de la Nature et a tendance à ne pas fragmenter l’écologie humaine  en un milieu naturel qui serait parallèle à un cadre de vie artificiel. L’écologie profonde n’aime pas la politique politicienne, se place beaucoup plus dans une optique de changement culturel, considérant que la culture n’est pas que le produit d’un environnement, mais qu’elle peut influer sur sa nature. Il s’agit donc de créer ou de retrouver une éthique environnementale  qui sera le point de rupture avec le capitalisme et son lot de modernismes écocidaires.

Ainsi,  l’écologie politique centre sa critique sur celle de la Technique, de l’idéologie scientiste devenue  la religion du Capitalisme de ce siècle. Cependant elle n’aspire non pas à l’occulter mais à en rependre le contrôle démocratique. La « deep ecology »,  elle,  aurait  tendance à refuser en bloc la technologie ;  et plus particulièrement l’industrialisation de l’existence humaine. D’ailleurs,  elle s’accorde sur un point essentiel qui serait la limitation du nombre d’êtres humains sur Terre qui appartiendrait autant à notre espèce qu’à toutes les autres formes de vies non humaines. Enfin, dans cette philosophie, l’être humain n’est pas non naturel, mais partie intégrante et prenante de l’écosystème Terre ; tandis que la Terre, serait elle-même un organisme vivant bien plus important, complexe et bien plus souverain de sa destinée que l’Humanité qu’elle héberge...

Que penser de tout cela, où situer l’écologie algérienne ?

Bien entendu, que les spécialistes ou puristes de chacune des particules  du  triptyque de l’Ecologie « occidentale »   me pardonnent les raccourcis et donc omissions dont j’aurais pu me rendre coupable,  par soucis de ne pas trop  surcharger  cet article. Il faudrait également préciser que l'écologie politique, comme l'environnementalisme se recontrent et s'opposent dans les multitudes de variantes par lesquelles ces deux mouvements sont milités. Ce clivage n'est donc pas aussi manichéen que cet article pourrait le laisser entendre par souci de vulgarisation.

Ma volonté, ici, par ce présent et court exposé, aura été de proposer à mes lectrices et lecteurs algériens une lecture un peu moins simpliste que celle abordée par nos médias  de ce que la notion d’Ecologie pourrait bien signifier. Cela avec bien entendu une finalité qui aussi simple et sincère  que de leur donner le choix de vouloir creuser ou non dans telle ou telle  piste ou terrain de l’Ecologie.

Puisque  l’Ecologie est une notion universelle qui doit, à mon humble avis, savoir se décliner selon l’environnement  local où elle est  pensée et agie, autant nous pencher très attentivement sur toutes les idées déjà produites autour de ce sujet, afin de donner à l’écologie Algérienne, ou « Darologie »,  toutes les chances de son côté  pour  se définir dans cette matrice globale  avec des bases qui lui permettront d’y  développer ses particularités locales.

 

 

Karim Tedjani

 

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