« En Algérie, sans la création d’une commission nationale des aires protégées, la loi relative à leur protection ne peut être appliquée… » Par Karim Tedjani.
La protection des aires naturelles est réglementée en Algérie par la loi n° 11-02 du 17 février 2011 relative aux aires protégées dans le cadre du développement durable. Cette dernière, a pour objet les classer en catégories et de déterminer les modalités de leur gestion ainsi que de leur protection. Elle abroge plusieurs articles de la loi n°3-10 du 19 juillet 2003 relative à la protection de l’environnement dans le cadre du développement durable.
C’est une loi en 47 articles qui a été promulguée par le Président de la République après avis du Conseil d’Etat et l’adoption du Parlement. Elle se base sur certains articles de la Constitution, la ratification par notre pays de nombreuses conventions internationales relatives à la protection de la nature ainsi que divers lois inscrites dans la législation algérienne. On y traite notamment des divers types de classifications de ses aires, des modalités de classifications ainsi que de leur gestion , de même que des dispositions pénales propres à ces dernières.
La loi n°11-02 du 17 Février 2011, établi plusieurs catégories d’aires protégées qui peuvent être dédiées à la protection de la faune, de la flore et d’écosystèmes terrestre, lacustre côtier et/ou marin. Elles peuvent être situées dans une ou plusieurs communes et concerner des habitats naturels ainsi que des zones humides. (Art.2, 3).
Le parc national est un espace naturel d’intérêt national qui a pour but de protéger l’intégrité d’un ou de plusieurs écosystèmes. Il est crée afin d’assurer la conservation et la protection de régions naturelles uniques. Il a également pour vocation d’être accessible à des fins d’éducation et de récréation. (Art.5).
Le parc naturel veille a assurer la préservation, la protection et la gestion durable de milieux naturels, de la faune, de la flore, d’écosystèmes et de paysages qui font la particularité d’une région. (Art. 6).
La réserve naturelle intégrale, elle, assure une protection intégrale de d’écosystèmes ou de spécimens vivants rares. Elle peut être située dans une autre aire protégée. Dans son enceinte, il est strictement interdit de résider, de pénétrer, de circuler ou de camper. Toute forme de pêche ou de chasse, d’abattage ou de capture de la faune y sont formellement prohibées. La destruction ainsi que la collecte de la flore sont également interdites dans ces aires. Il en va de même de l’exploitation forestière, agricole ou minière, de toute forme de pâturage. Il n’est pas autorisé dans ces aires de modifier l’aspect du terrain ou de la végétation. Seules des activités de recherches scientifiques sont tolérées dans les réserves naturelles intégrales de même que des projets d’intérêts nationaux à condition que leur établissement soit statué par le conseil des ministres. (Art.7, 8, 9).
La réserve naturelle est un espace de protection naturelle moins restrictif où toutes les activités humaines sont réglementées afin de veiller à ce qu’elles ne mettent pas en péril la conservation, la protection ou bien encore la restauration des espèces vivantes, des écosystèmes et des habitats naturels. (Art. 10).
La réserve de gestion des habitats et des espèces est un espace dont la finalité est d’assurer la conservation des espèces et de leurs habitats. Elle doit également garantir et maintenir les conditions d’habitats nécessaires à la préservation et la protection de la diversité biologique.(Art.11).
Un site naturel au sens de cette loi qualifie tout espace contenant un ou plusieurs éléments naturels d’importance environnementale dont les cratères, les chutes d’eau ainsi que les dunes de sable. (Art.12).
Un corridor biologique est un espace naturel assurant la liaison entre différents écosystèmes ou habitats d’une espèce ou d’un groupe d’espèces interdépendantes permettant sa dispersion et sa migration. Elle est vitale au maintien de la biodiversité animale et végétale ainsi que la survie des espèces. (Art.13)
Les parcs nationaux et naturels, Les réserves naturelles, Les réserves de gestion des habitats et des espèces ainsi que les sites naturels sont structurées en trois zones :
Une Zone centrale recèle de ressources uniques. Seules les activités liées à la recherche scientifique y sont autorisées.
Une zone tampon entoure ou jouxte la zone centrale. Elle est dédiée à des pratiques « écologiquement viables » telles que l’écotourisme, l’éducation environnementale, les loisirs ainsi que la recherche appliquée et fondamentale. Bien qu’ouverte au public pour des visites guidées de découverte, aucune modification ou activités susceptible de perturber son équilibre n’y est permise.
Une zone de transition entoure la zone tampon et protège les deux premières zones. Les activités de récréations, de détente, de loisirs et de tourisme y sont autorisées.
Une commission de wilaya est chargée de proposer des aires à la Commission nationale des aires protégées qui doit décider quel statut il faut attribuer à ces espaces naturels. (Art.17).
Le statut d’aire naturelle protégée incombe un plan de gestion exhaustif ainsi qu’un schéma directeur qui fixe les orientations et objectifs à atteindre à long terme.
Toute infraction à la réglementation environnementale algérienne dans ces aires est passible de peines d’emprisonnements allant de deux mois à trois ans et d’amendes entre 100 000 dinars et 1000 000 selon les cas (Art. 40, 41, 42, 43, 44).
Si en théorie cette loi est un outil juridique qui pourrait permettre de sauver bien des joyaux de la nature algérienne des impacts du développement anarchique de notre pays , dans la pratique elle souffre, jusqu’à ce jour du moins , de l’absence d’une commission nationale des aires protégées .
Ainsi, des aires naturelles aussi importantes que la forêt de l’Akfadou, la région de Guerbes-Sanhadja et tant d’autres à travers le pays n’ont toujours pas bénéficié des prescriptions établies par la législation algérienne relative aux aires naturelles protégées à cause de ce vice d’application…
Source : Journal Officiel de la République n°13