7 Septembre 2016
Chapitre huit
"Une société humaine..."
Parler d’une Justice relative au régime politique « Climat » n’est pas du tout une mince affaire. Du moins, c’est un exercice périlleux mais nécessaire, pour qui aspire à cela sans se contenter seulement de se fier aux opinions publiques. Dans ce débat climatique, bien des propagandes politiques, autant que des slogans publicitaires, sont prolixes à nous éclairer de leurs lumières tamisées par des intérêts bien particuliers. Tout cet environnement de subjectivités ne peut que venir amplement parasiter la qualité d’un tel sujet de société humaine. Il est à bien des titres fondateur et universel. Encore plus, en ces temps de modernisme ultra productiviste, agité par un système mondial de principes parmi les plus écocidaires pour l’Humanité, d’ailleurs, que pour la Planète. .
Pour l’Humanité du 21ème siècle, fille de l’aube d’un nouveau millénaire, le nouveau paradigme social qu’elle produira, afin de répondre à tel défi, sera peut-être agent d’une renaissance de la nature humaine. Elle serait naturellement sympathique à l’égard de son environnement. Ou, faute de trouver cette nouvelle modernité, les prochaines décennies annonceront sûrement le début de la fin sur Terre de l’Homme hyper-industriel.
Il faut donc élargir la notion de Justice au champ lexical de l’environnement et non le réduire à une simple législation climatique. Car c’est un défaut de chaleur humaine qui est la cause principale de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, et non forcement le contraire. Même si vivre dans une atmosphère de pollution et d’irresponsabilité écologique n’est pas le meilleur cadre d’existence pour avoir une telle inclinaison vers la convivialité ainsi que le bien vivre ensemble. Comment pourrait-on envisager cela quand chacun d’entre nous empoisonne son prochain ? Par nombre de gestes quotidiens qui nous paraissent pourtant si anodins à accomplir...
Pour répondre à cette question, je vous propose de continuer d’appliquer une méthode, certes assez rudimentaire, mais qui n’en reste pas moins très pratique et relativement sûre, il me semble. Pour poser les premières pierres d’une analyse d’un sujet, il n’est en effet pas mauvais d’apporter un soin tout particulier à chercher tout d’abord les identités plutôt que la variété qui le composent. Afin de mieux cerner plus tard les différences de point de vue, comme de natures qui donneront tout l’attrait ainsi que la profondeur de cette idée ainsi abordée. De la même manière que je me suis appliqué à le faire pour la Justice, nous allons donc envisager l’idée de Justice climatique ; du point de vue de la Tradition humaine la plus originelle et universelle possible. Puis nous verrons si cette tradition est applicable aux principes modernes de Liberté et d’Egalité si chères aux sociétés républicaines modernes, comme au libéralisme économique le plus radical.
La Justice qui se profile au sein du régime climatique international organisé par l’ONU et ses corollaires est-elle vraiment légitime à se réclamer une « utopie réaliste » ? Pour reprendre la formule de l’auteur de « La théorie de la Justice ». C’est-à-dire capable d’être le médiateur entre un idéal de société et la réalité d’un monde si enclin à l’injustice, aussi sûrement que l’idée de Justice ne parait pas innée chez nous; pour bien des grands penseurs modernes et antiques, comme dans l’esprit pratique de bien des quidams de ce Monde.
Pour cela, nous allons devoir nous interroger sur le caractère juste ou non de l’influence du Climat sur nos sociétés. Quelle pourrait-être la nature de cette Justice ? Ou bien, est-ce l’idée d’une Justice climatique qui serait purement physique ? Cela implique qu’elle serait active à équilibrer les avantages, mais aussi les inconvénients liés au changement climatiques global de la « Terre des Hommes »; pour les redistribuer entre chaque sociétaire d’un contrat social mondial dont le critère de justice serait justement un équilibre mondial, non moral ou politique, mais plutôt climatique ? N’est-ce pas ce que cette de justice climatique voudrait nous faire admettre ? Je ne saurais dire si je suis un adepte averti du courant Communautariste de la Justice, principal adversaire de la « Théorie de la Justice » de Rawls. Qui très en vogue parmi la majeure partie des sociétés de ce monde d’obédiences culturelle anglo-saxonne. Et qui joue une très grande influence, il me semble dans la nature même de la Justice qu’est censé incarner un Accord du le Climat mondial, ainsi que toute la législation qui lui serait corolaire.
De nouveau, nous devons nous rappeler quelle place judiciaire le Climat occupait dans la psyché collective de l’Humanité antique. Comment avait-on, jadis, coutume de considérer autant la légitimité que la légalité de cette force de la Nature ; qui n’aura d’ailleurs pas toujours été très tendre avec nos civilisations. Plus d’une fois, le Climat fut un agent accélérateur de leurs décadences...était-ce juste ou légal ?
Alors, munis de ce modeste début de connaissance, nous pourrons peut-être aborder le thème dans sa modernité, c’est-à-dire selon une tradition dont les principes demeurent par-delà les âges de l’Humanité ; tandis que les modes et les formes évoluent au grès de l’évolution humaine. Mais surtout afin d’identifier les potentielles différentes traditions de Justices qui pourraient bien se rencontrer au sens du régime climatique mondial le plus étendu à l’ensemble de la société humaine.
Un des symboles de cette Justice les plus évidents, et donc communs à beaucoup de cultures humaines, c’est bien entendu l’histoire du Déluge.
En effet, des Sumériens aux religions Abrahamiques, plus d’une dizaine de grands textes religieux, à travers le Monde, font référence à cette catastrophe climatique. A chaque fois on relate qu’elle faillit bien éradiquer l’espèce humaine de la surface terrestre. A bien des égards, puisque qu’elle est admise par la majeure partie de nos traditions spirituelles, nous pouvons apprendre de cette histoire quels pourraient être les principes d’une telle justice ; du moins déjà dans les plus antiques profondeurs de l’esprit humain.
En tout premier lieu, il faut considérer la nature même de cette Justice, de quel côté de la balance entre légitimé et légalité son inclinaison est la plus marquée. Il parait incontestable qu’elle a un caractère plus légitimiste que légaliste ; puisque le motif de cette Justice vindicative est d’ordre tout ce qu’il y a de plus moral. Cette pluie diluvienne n’est en rien la sentence d’aucune loi humaine. Elle est d’origine Céleste et, elle a pour motif de punir la dépravation irréversible de l’Humanité. Devenue Bête Humaine, dès lors qu’elle aura oublié sa nature de création divine. Il est d’ailleurs très révélateur de voir que dans cette déchéance, toute autre forme de vie ne sera quasiment pas épargnée par ces trombes justicières.
Comme si toute la faune et flore terrestre devait forcement payer également pour les erreurs de l’Humanité. Mais l’Homme n’est-il pas devenu depuis un « horrible » idolâtre de la Nature ? À force de se vautrer dans la luxure facile et la fascination pour les choses matérielles. Ne s’agit-il pas ainsi de supprimer tout un système environnemental, à la fois matériel et immatériel ? Peut-être que les Humains auront pervertie même la Nature en se l’appropriant comme un objet de sacrifice et non comme le prolongement sacré d’une Force bien plus immense ? Etait-elle devenue impure aux yeux de la Justice céleste ? Le fait est que l’Homme est ici le seul coupable responsable de cette Calamité, et que les autres espèces vivantes apparaissent dans ce récit comme les victimes collatérales de la folie dépravante des humains.
Mais, me direz-vous, pour les moins sensibles à de telles évocations religieuses, en quoi ce déluge pouvait-il être bien juste ? Est-ce seulement une vengeance aveugle ? Son héritage laissé dans nos cultures respectives est-il uniquement la mémoire d’une terrible injustice ou bien d’un avertissement céleste ?
C’est que cette Justice, qui n’est pas celle du Climat, mais d’une Force métaphysique, aura bien choisi de répartir cette sentence selon des critères de justesse bien établis. L’Alliance entre l’Homme et son Créateur n’a pas été respectée par le premier ; et ce, malgré l’envoi de nombreux prophètes, d’une succession d’avertissements venus du Ciel. C’est parce que l’Humanité paraissait avoir atteint un point de non-retour définitif dans sa décadence et son obstination à la nourrir dans son cœur, qu’il aura fallu purifier la Terre de cette pollution (qui a pour racine le mot « profanation »). Mais, ce n’est pas ici, apparemment, une Justice aveugle, car elle n’est pas cruelle avec l’innocent.
Noé, égaré parmi la foule de prédateurs civilisés qui l’entoure, comme la descendance des animaux terrestres, ne devront pas en subir les punitions, mais bien en récolter la récompense. De leur innocence animale ou bien de leur vertu humaine. Le mérite est d’avoir su résister au Mal séducteur, à l’obscurité morale des chandelles de la luxure ainsi que de l’égoïsme. Ils ont ainsi gagné du Ciel l’honneur de participer à la fondation d’un nouveau Monde, lavé de tous les précédents pêchers de l’Humanité. Je pense qu’en substance, le message de justice que nous a transmis la Tradition diluvienne, est ainsi fondé; non au sens de forcément juste, mais plutôt de sens principal.
Même si cette justice, parmi des nuées de formes vivantes, n’aura épargné que de quoi remplir de vie juste une seule Arche. Malgré tout, ceux qui n’auront pas fauté ne subiront pas le sort de leurs semblables. Une chance est laissée à l’espèce humaine d’apprendre de ses erreurs et de refonder une nouvelle Alliance avec son Créateur. Cette même justice créera les conditions de la disparition de millions d’injustes, comme elle veillera à avertir et guider les justes. Ce sera bien du Ciel que viendra également les plans ainsi que la technologie du Salut de l’Humanité, qui ne doit pas disparaitre totalement, mais changer radicalement.
On peut dire également que cette Justice, pour établir un nouveau contrat moral avec l’Humanité, a décidé de faire table rase du passé. Propulse l’être humain dans un monde de nouveaux Possibles ; jusque-là inexplorés ou bien inaccessibles ; par ce que éloignés des mauvaises habitudes qu’il aura cultivé comme on bâtirait un temple au sacrilège.
Mais ce n’est pas une société qui allie ici le Ciel et l’Humanité, ni un contrat social ou légal délibéré par les deux parties. Il s’agit de convaincre, et de punir, s’il le faut. C’est encore l’ère du Dieu vengeur et justicier. Comme toute vision traditionnelle, ici, c’est le Tout qui l’emporte sur l’unité, l’ensemble sur l’individualité, qui doit se plier à des règles immuables dont les voies ne peuvent qu’échapper à l’entendement humain.
Dans cette morale diluvienne, on n’est pas encore à la démonstration seulement métaphysique d’une Révélation, comme dans le Coran ; ou bien ni celle de l’empathie et des miracles du Jésus chrétien. Dans la tradition biblique, il me semble qu’il faudra attendre le prophète Isaïe pour entendre évoquer l’idée d’un Dieux miséricordieux. Ce que l’on ne dit pas souvent à propos du Déluge, c’est que, dans la tradition Abrahamique juive, Dieu aurait promis à Noé de ne plus jamais procéder ainsi pour établir l’Ordre sur Terre. Par contre, à chaque fois que l’Humanité aura mérité de subir le Déluge, il le signifiera en faisant apparaitre un Arc en ciel sur Terre. C’est donc une Justice qui était censé être miséricordieuse et capable d’évoluer dans ses formes tout en gardant sa nature la plus transcendantale et profonde.
Voici donc mes premières remarques sur ce Mythe. D’ores et déjà, après ce premier « balayage » symbolique, je pense que nous pouvons y retrouver certaines caractéristiques ou notion dans le débat que se livre deux des principaux pôles de Justice climatiques que nous avons déjà évoqué ultérieurement...
A suivre...