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Nouara Algérie

ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )

Le dernier des grands carnassiers

C’est le dernier grand carnassier d’Algérie et il pourrait bientôt rejoindre la liste des animaux disparus, comme le lion de l’Atlas ou la panthère d’Afrique du Nord.

Victime de la prédation des hommes et de la disparition progressive de son milieu naturel, l’hyène rayée avait pratiquement disparu avant de faire un retour très timide ces dernières années. Pourtant, malgré cette situation précaire, l’hyène rayée est impitoyablement chassée et massacrée dès qu’elle est aperçue ou signalée quelque part.

Et pour cause, aussi craint que haï, ce grand fauve possède une réputation exécrable. Dans les villages et hameaux de Kabylie comme à travers toutes les campagnes algériennes, l’hyène est un animal mythique sur lequel court beaucoup d’étranges et sordides légendes.

Il serait un déterreur de cadavres, un répugnant charognard qui n’hésiterait pas à s’attaquer à des enfants esseulés, à de vieilles personnes sans défense ou même à un âne oublié dans un pré. Tout concourt à faire de ce grand carnassier un animal à part : son étrange allure avec un arrière-train baissé, sa mâchoire surpuissante capable de broyer de gros os comme des bûchettes d’écolier, ses ricanements qui ressemblent à des rires moqueurs et son goût immodéré pour la charogne.

 

A telle enseigne que la simple évocation de son nom suscite dégoût, peur panique et frayeur. Pourtant, ses mœurs nocturnes en font un animal très discret que l’on croise rarement, donc que l’on connaît que par les histoires que l’on raconte sur lui. En fait, l’hyène, et à bien des égards le vautour, est l’éboueur, le nettoyeur des forêts et des milieux naturels.

Et en dépit d’une sulfureuse réputation, l’hyène est un animal discret et craintif qui fait tout pour éviter de croiser les humains qu’il craint par-dessus tout. Khadidja Bentabet est une jeune doctorante en foresterie. Elle travaille depuis trois ans sur «L’écologie tropique et génétique de la hyène rayée en Algérie».

Pour cette jeune chercheuse, l’hyène joue un rôle très important dans l’équilibre naturel. «C’est un grand nettoyeur de la nature qui se nourrit de charognes et de restes qu’il trouve dans les poubelles et les décharges. D’après l’étude de ses déjections, 90% de sa nourriture est constituée du sanglier. La hyène ne sort jamais le jour sauf exceptionnellement. Les lumières la dérangent, elle est très timide et craintive et elle ne s’attaque jamais aux humains», dit-elle.

D’après ses recherches, l’hyène est réapparue principalement en Kabylie et dans les Aurès mais outre le fait qu’elle est victime de sa mauvaise réputation, la menace contre cette espèce viendrait plutôt du fait que des parties de sa carcasse sont très demandées par les charlatans pour usage de sorcellerie. «On ne peut pas vraiment travailler à sa conservation si on ne la connaît pas bien. Il faut continuer à étudier son régime alimentaire, son biotope, ses mœurs, etc.

Il convient surtout de sensibiliser les citoyens à sa protection», dit-elle encore. Ali Mahmoudi, ancien directeur du Parc national du Djurdjura et du Gouraya et actuel premier responsable du secteur des forêts de Béjaïa, en parle : «L’hyène rayée est protégée par la législation algérienne depuis 1983, car elle figure dans la liste des 33 mammifères protégés, menacés de disparition. La remontée biologique de l’hyène rayée a commencé aux alentours de l’année 1989.

Cette année-là, nous avons récupéré une première hyène agonisante qui avait été blessée par un berger à proximité d’un point d’eau au sud du village de Bechloul. Nous l’avons emmenée chez un vétérinaire qui lui a fait une injection d’adrénaline. Malheureusement, elle est morte. Les gens parlaient d’un ''lion tué''. Dans la région de Béjaïa, la première hyène abattue par un émigré a été signalée en 2005. Puis elle a refait surface un peu partout.

Elle a également été signalée dans les Aurès et dans la chaîne des Bibans des montagnes, qui ont la particularité de ne pas être trop habitées dans sa partie ouest.» Pour notre forestier, l’hyène rayée ne s’attaque pas aux humains, contrairement à l’hyène tachetée qui est beaucoup plus dangereuse.

«En Afrique noire, les mères recommandent à leurs enfants à se mettre sur la pointe des pieds et de lever les bras au ciel à la vue d’une hyène tachetée pour paraître plus grand», dit-il. «Chez nous, elle est systématiquement massacrée et il m’arrive de voir des photos d’hyènes exhibées sur Facebook comme des trophées de chasse.

Il y a même eu des affiches placardées dans certaines régions pour dire qu’un animal très dangereux circule et qu’il convient de l’abattre à vue», s’offusque cet homme qui connaît bien la faune et la flore. Pour le docteur Mourad Ahmim, enseignant chercheur à l’université de Béjaïa, spécialiste des mammifères et spécialisé en biologie de la conservation : «Cette espèce pourrait bientôt disparaître si des mesures ne sont pas prises pour sa protection et conservation car elle fait l’objet d’un massacre systématique dans les régions où elle est signalée.

 

Cela est dû au fait qu’on la confond avec l’hyène tachetée (Crocuta crocuta) qui n’existe pas en Algérie et qui est montrée dans des documentaires animaliers, diffusés par les chaînes satellitaires, comme un dangereux prédateur. J’ai répertorié plus de 200 individus abattus entre 2000 et 2018. A ce rythme, l’espèce va bientôt disparaître.»
Le message est donc clair. Si rien n’est fait pour assurer sa protection, l’hyène risque d’être rayée mais cette fois-ci définitivement.           

Djamel Alilat
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