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Nouara Algérie

ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )

"Algérie a-t-elle vraiment l'eau de ses ambitions? " Par Karim Tedjani

Dans la presse algérienne, il n’est pas rare de  lire des déclarations  annonçant tel ou tel programme gouvernemental destiné à  développer des secteurs économiques  phares comme l’agriculture, l’industrie et même le tourisme.  On ne doit pas  douter des sommes colossales que  l’Algérie est à même d’investir pour s’engager dans toutes ces voies. Certes, c’est indéniable. 

Mais il serait également sage de se rappeler que, si  notre pays dispose de réserves gazières et pétrolières qui semblent encore assez confortables, en ce qui concerne l’eau, c’est une bien autre et inquiétante histoire.

L’Algérie est un pays riche  en manque cruel d’eau.  Pourra-t-on vraiment prétendre réaliser tous ces objectifs de développements  économiques dans un tel contexte de stress hydrique aigu ?

La Tunisie et le Maroc, nos chers amis Maghrébins, ont déjà fait la cuisante expérience de combiner une agriculture mal irriguée à un tourisme de masse lui aussi  très prompte au  gaspillage de l’eau. Que dire de leurs industries qui sont demeurés très longtemps  outrageusement polluantes.  Chacune de ces nations  s’est retrouvé face à des choix de développement  cornéliens  par manque de ressource aquifère.

Un  parcours de golf «  à l’européenne », installé dans un climat aride,  consomme  chaque jour autant  d’eau que  huit habitants locaux. Une irrigation classique, dans le même contexte climatique, accuse un taux d’au moins 40 % d’évaporation  dans l’air. La Tunisie et le Maroc  ont  développé des secteurs comme la tannerie ou le textile   très toxiques pour l’environnement,  et notamment  en ce qui concerne  les ressources hydriques environnantes.  D’autant que le traitement  effectif des  eaux usées est assez récent dans ces deux jeunes nations.

 Depuis,  dans ces pays, des mesures ont été prises, des comportements modifiés grâce, le plus souvent,  à une bonne connexion entre le monde associatif et les institutions politiques.  On parle, de plus en plus souvent d’irrigation  au  « goutte à goutte », de la récupération de l’eau de pluie pour l’usage non domestique de l’eau dans les habitations. Libérée de l’utilisation d’intrants chimiques très toxiques pour les sols et les cours d’eau, l’agriculture bio semble être entrée dans les mœurs de nombreux agriculteurs. La progressive mutation de leur tourisme de masse en un écotourisme plus éco responsable et solidaire est aussi une bonne chose pour les ressources hydriques de ces pays car elle implique une nette diminution de la part du tourisme dans la consommation nationale.   

On construit également des barrages, on multiplie les retenues collinaires.  En Lybie, on s’essaie même  au dessalement de l’eau de mer,  mais on est aussi  capable de créer une rivière artificielle en détournant l’eau du désert ! Pour de tels choix,  dont notre pays ne s’est d’ailleurs pas abstenu, il serait d’ailleurs important de se s poser quelques questions…

Ces indéniables efforts  ne  se  font  malheureusement ressentir  pour l’instant  qu’en zone urbaine. Dans les douars, les chosent restent  dans l’ensemble peu changées : tout le monde n’a pas encore  un droit d’accès   facile à une eau potable. Pourtant  un des plus élémentaires pour  toutes les femmes et les hommes qui peuplent cette planète.  On ne peut pas encore dire  de ces pays qu’ils aient encore gagnée la bataille de l’eau, celle que tout le Maghreb, enfin uni,  devrait s’appliquer à rempoter  de concert  afin d’éviter la guerre de l’eau qui pourrait bien faire rage dans cette partie du monde dès 2025.

 

L’Algérie  est, sans contexte,  un des pays africain qui s’est   le plus engagé financièrement  afin  remédier à la problématique de l’eau.  Face à la faible pluviométrie  ainsi que l’extrême disparité de la ressource à travers un vaste territoire, assurer une fourniture en eau potable domestique plus régulière aux citoyens n’est pas une mince affaire.  C’est un des pays les plus riche du Maghreb et de l’Afrique, il dispose  de ce fait d’une force d’investissement  qui, bien exploitée,  est à la mesure des défis économiques  et environnementaux  imposés le manque d’eau.

Des efforts indéniables  et soutenus ont été consentis en un temps record par l’Etat algérien. En à peine une décennie, le pays a franchi un pas décisif en la matière,  faisant de l’eau une de ses priorité politique nationale et, de ce fait, a consenti à d’importantes dépenses pour  aller dans ce sens.  A court et parfois moyen terme, des résultats encourageants  ont été obtenus  avec un  certain succès.

Mais,  dépenser   beaucoup de l’argent  permet-il forcement d’économiser  autant d’eau dans de bonnes conditions durables ? Multiplier les grands barrages, privatiser les services de l’eau, dessaler l’eau de mer ; tout cela suffira-t-il dans un pays où les pénuries d’eau et la mauvaise qualité de l’eau du robinet sont encore le lot quotidien de millions de consommateurs algériens ? En Algérie, il existe encore des agriculteurs obligés d’irriguer leurs champs avec des eaux grises ou usées ! Et, rappelons-le, le pays n’a pas encore développé ni de véritable industrie et encore moins de tourisme…

Pourquoi, une fois de plus, comme pour l’énergie, on répond à la croissance de la demande par celle de la production et non, par l’optimisation de l’efficacité hydrique du système national.  Trop d’eau est gaspillée à cause de la vétusté des réseaux. L’irrigation au goutte à goutte n’est pas encore de rigueur dans les zones très arides et l’on utilise de l’eau potable pour des taches domestiques qui pourraient être assurées en récoltant l’eau de pluie.

Un barrage  de stockage d’eau plein ne veut pas forcement dire  qu’il est  efficient.  Plus il est grand et plus son envasement est important. Quand  ce dernier  prend des proportions alarmantes,  faute d’un entretien suivi, les quantités d’eau ne correspondent pas à celles vraiment disponibles pour le consommateur.   Les barrages doivent être à l’abri des pollutions, leur présence incombe l’absence  à leur périphérie d’activités minières, industrielles ou agricoles, surtout si elles sont intensives. Au risque  sinon de provoquer de dangereuses pollutions de l’eau stockée dans ces barrages. Parfois les stations d’épurations de ces infrastructures  ne sont pas assez performantes pour assurer un débit de fourniture régulier car elles sont régulièrement saturées. Enfin, d’un point de vue écologique, la présence de tels volumes d’eau stagnante, en faisant augmenter le taux d’humidité des climats locaux, bouleverse  l’équilibre biologique des régions où ils ont été installés.  Ainsi, en Kabylie, depuis la construction du barrage de Tabsket, le cerisier a commencé à disparaitre…

Le dessalement de l’eau de mer  est une technique réservée aux pays riches comme l’Algérie  et la Lybie tant cette technologie incombe d’énormes d’énergie. L’eau produite, même par osmose inversée, s’avère très coûteuse  et d’un goût très peu engageant.  L’entretien de ces stations de dessalement doit être très assidu  afin de lutter contre la corrosion saline.  Soyons clair, si les Algériens peuvent se permettre de consommer de l’eau de mer dessalée, c’est parce qu’elle est largement subventionnée par l’Etat. Cela ne peut être une solution durable, à mon d’en limiter sérieusement le coût énergétique et financier. De plus l’impact  des saumures, réinjectées  dans l’environnement marin fait l’objet de nombreuses polémiques.  Des secteurs comme la pêche ou le tourisme balnéaire, totalement dépendants de l’équilibre écologique du littoral, peuvent être très perturbées par une telle pollution si elle s’avère  exister. La technique est trop récente pour que l’on puisse avoir le recul nécessaire pour en juger.   

La privatisation des services  de l’eau, la plupart du temps par des compagnies étrangères, n’a pas toujours été heureuse en Algérie. Par un  étrange sort du destin, les maîtres de l’eau d’ailleurs semblent moins regardants sur la qualité des services qu’ils assurent chez nous. La preuve, le marché de l’eau minérale est en pleine expansion tant l’eau domestique n’inspire pas confiance aux consommateurs et elle s’avère parfois la seule source d’eau potable disponible en cas de longue  pénuries. Il y a encore trop de quartier populaires ou de villes de provinces qui souffrent de pénuries récurrentes et dont l’eau de piètre qualité. Certains de ces  partenaires « exotiques »  comme Nestlé Waters ont tout  à gagner quand le système hydraulique d’un pays est déficient. Il peut y avoir conflit d’intérêt et délits d’initiés quand l’eau devient seulement une marchandise et non un droit civique et divin.

Non, l’Algérie n’a pas encore gagné toutes ses batailles de l’eau.   Et, puisqu’elle a décidé d’exploiter du gaz et du pétrole  de schiste  en puisant massivement  l’eau de son Sahara, une ressource  aquifère fossile  peu renouvelable, qu’elle fait courir à cette richesse  de terribles menaces de pollutions, les efforts d’hier et d’aujourd’hui risquent d’être réduits à néant…

Cette nouvelle donne risque de peser lourd sur les capacités de notre pays à diversifier son économie quand  on sait que nous sommes en stress hydrique alors que nous n’avons pas encore développé d’agriculture intensive ou d’industrie digne de ce nom…

Il existe d’autres solutions préventives  moins technologiques, plus axées sur des changements comportementaux  qui me paraissent un peu trop négligée la gestion de l’eau en Algérie. Ils sont, pour la plupart corolaires au concept d’efficacité hydraulique, d’une optimisation de la consommation ainsi qu’une lutte acharnée contre le gaspillage  à tous les échelons du système hydraulique  algérien. Nous les aborderons Inchallah  dans un prochain article…

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