ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )
18 Novembre 2013
Dans la presse algérienne, il n’est pas rare de lire des déclarations annonçant tel ou tel programme gouvernemental destiné à développer des secteurs économiques phares comme l’agriculture, l’industrie et même le tourisme. On ne doit pas douter des sommes colossales que l’Algérie est à même d’investir pour s’engager dans toutes ces voies. Certes, c’est indéniable.
Mais il serait également sage de se rappeler que, si notre pays dispose de réserves gazières et pétrolières qui semblent encore assez confortables, en ce qui concerne l’eau, c’est une bien autre et inquiétante histoire.
L’Algérie est un pays riche en manque cruel d’eau. Pourra-t-on vraiment prétendre réaliser tous ces objectifs de développements économiques dans un tel contexte de stress hydrique aigu ?
La Tunisie et le Maroc, nos chers amis Maghrébins, ont déjà fait la cuisante expérience de combiner une agriculture mal irriguée à un tourisme de masse lui aussi très prompte au gaspillage de l’eau. Que dire de leurs industries qui sont demeurés très longtemps outrageusement polluantes. Chacune de ces nations s’est retrouvé face à des choix de développement cornéliens par manque de ressource aquifère.
Un parcours de golf « à l’européenne », installé dans un climat aride, consomme chaque jour autant d’eau que huit habitants locaux. Une irrigation classique, dans le même contexte climatique, accuse un taux d’au moins 40 % d’évaporation dans l’air. La Tunisie et le Maroc ont développé des secteurs comme la tannerie ou le textile très toxiques pour l’environnement, et notamment en ce qui concerne les ressources hydriques environnantes. D’autant que le traitement effectif des eaux usées est assez récent dans ces deux jeunes nations.
Depuis, dans ces pays, des mesures ont été prises, des comportements modifiés grâce, le plus souvent, à une bonne connexion entre le monde associatif et les institutions politiques. On parle, de plus en plus souvent d’irrigation au « goutte à goutte », de la récupération de l’eau de pluie pour l’usage non domestique de l’eau dans les habitations. Libérée de l’utilisation d’intrants chimiques très toxiques pour les sols et les cours d’eau, l’agriculture bio semble être entrée dans les mœurs de nombreux agriculteurs. La progressive mutation de leur tourisme de masse en un écotourisme plus éco responsable et solidaire est aussi une bonne chose pour les ressources hydriques de ces pays car elle implique une nette diminution de la part du tourisme dans la consommation nationale.
On construit également des barrages, on multiplie les retenues collinaires. En Lybie, on s’essaie même au dessalement de l’eau de mer, mais on est aussi capable de créer une rivière artificielle en détournant l’eau du désert ! Pour de tels choix, dont notre pays ne s’est d’ailleurs pas abstenu, il serait d’ailleurs important de se s poser quelques questions…
Ces indéniables efforts ne se font malheureusement ressentir pour l’instant qu’en zone urbaine. Dans les douars, les chosent restent dans l’ensemble peu changées : tout le monde n’a pas encore un droit d’accès facile à une eau potable. Pourtant un des plus élémentaires pour toutes les femmes et les hommes qui peuplent cette planète. On ne peut pas encore dire de ces pays qu’ils aient encore gagnée la bataille de l’eau, celle que tout le Maghreb, enfin uni, devrait s’appliquer à rempoter de concert afin d’éviter la guerre de l’eau qui pourrait bien faire rage dans cette partie du monde dès 2025.
L’Algérie est, sans contexte, un des pays africain qui s’est le plus engagé financièrement afin remédier à la problématique de l’eau. Face à la faible pluviométrie ainsi que l’extrême disparité de la ressource à travers un vaste territoire, assurer une fourniture en eau potable domestique plus régulière aux citoyens n’est pas une mince affaire. C’est un des pays les plus riche du Maghreb et de l’Afrique, il dispose de ce fait d’une force d’investissement qui, bien exploitée, est à la mesure des défis économiques et environnementaux imposés le manque d’eau.
Des efforts indéniables et soutenus ont été consentis en un temps record par l’Etat algérien. En à peine une décennie, le pays a franchi un pas décisif en la matière, faisant de l’eau une de ses priorité politique nationale et, de ce fait, a consenti à d’importantes dépenses pour aller dans ce sens. A court et parfois moyen terme, des résultats encourageants ont été obtenus avec un certain succès.
Mais, dépenser beaucoup de l’argent permet-il forcement d’économiser autant d’eau dans de bonnes conditions durables ? Multiplier les grands barrages, privatiser les services de l’eau, dessaler l’eau de mer ; tout cela suffira-t-il dans un pays où les pénuries d’eau et la mauvaise qualité de l’eau du robinet sont encore le lot quotidien de millions de consommateurs algériens ? En Algérie, il existe encore des agriculteurs obligés d’irriguer leurs champs avec des eaux grises ou usées ! Et, rappelons-le, le pays n’a pas encore développé ni de véritable industrie et encore moins de tourisme…
Pourquoi, une fois de plus, comme pour l’énergie, on répond à la croissance de la demande par celle de la production et non, par l’optimisation de l’efficacité hydrique du système national. Trop d’eau est gaspillée à cause de la vétusté des réseaux. L’irrigation au goutte à goutte n’est pas encore de rigueur dans les zones très arides et l’on utilise de l’eau potable pour des taches domestiques qui pourraient être assurées en récoltant l’eau de pluie.
Un barrage de stockage d’eau plein ne veut pas forcement dire qu’il est efficient. Plus il est grand et plus son envasement est important. Quand ce dernier prend des proportions alarmantes, faute d’un entretien suivi, les quantités d’eau ne correspondent pas à celles vraiment disponibles pour le consommateur. Les barrages doivent être à l’abri des pollutions, leur présence incombe l’absence à leur périphérie d’activités minières, industrielles ou agricoles, surtout si elles sont intensives. Au risque sinon de provoquer de dangereuses pollutions de l’eau stockée dans ces barrages. Parfois les stations d’épurations de ces infrastructures ne sont pas assez performantes pour assurer un débit de fourniture régulier car elles sont régulièrement saturées. Enfin, d’un point de vue écologique, la présence de tels volumes d’eau stagnante, en faisant augmenter le taux d’humidité des climats locaux, bouleverse l’équilibre biologique des régions où ils ont été installés. Ainsi, en Kabylie, depuis la construction du barrage de Tabsket, le cerisier a commencé à disparaitre…
Le dessalement de l’eau de mer est une technique réservée aux pays riches comme l’Algérie et la Lybie tant cette technologie incombe d’énormes d’énergie. L’eau produite, même par osmose inversée, s’avère très coûteuse et d’un goût très peu engageant. L’entretien de ces stations de dessalement doit être très assidu afin de lutter contre la corrosion saline. Soyons clair, si les Algériens peuvent se permettre de consommer de l’eau de mer dessalée, c’est parce qu’elle est largement subventionnée par l’Etat. Cela ne peut être une solution durable, à mon d’en limiter sérieusement le coût énergétique et financier. De plus l’impact des saumures, réinjectées dans l’environnement marin fait l’objet de nombreuses polémiques. Des secteurs comme la pêche ou le tourisme balnéaire, totalement dépendants de l’équilibre écologique du littoral, peuvent être très perturbées par une telle pollution si elle s’avère exister. La technique est trop récente pour que l’on puisse avoir le recul nécessaire pour en juger.
La privatisation des services de l’eau, la plupart du temps par des compagnies étrangères, n’a pas toujours été heureuse en Algérie. Par un étrange sort du destin, les maîtres de l’eau d’ailleurs semblent moins regardants sur la qualité des services qu’ils assurent chez nous. La preuve, le marché de l’eau minérale est en pleine expansion tant l’eau domestique n’inspire pas confiance aux consommateurs et elle s’avère parfois la seule source d’eau potable disponible en cas de longue pénuries. Il y a encore trop de quartier populaires ou de villes de provinces qui souffrent de pénuries récurrentes et dont l’eau de piètre qualité. Certains de ces partenaires « exotiques » comme Nestlé Waters ont tout à gagner quand le système hydraulique d’un pays est déficient. Il peut y avoir conflit d’intérêt et délits d’initiés quand l’eau devient seulement une marchandise et non un droit civique et divin.
Non, l’Algérie n’a pas encore gagné toutes ses batailles de l’eau. Et, puisqu’elle a décidé d’exploiter du gaz et du pétrole de schiste en puisant massivement l’eau de son Sahara, une ressource aquifère fossile peu renouvelable, qu’elle fait courir à cette richesse de terribles menaces de pollutions, les efforts d’hier et d’aujourd’hui risquent d’être réduits à néant…
Cette nouvelle donne risque de peser lourd sur les capacités de notre pays à diversifier son économie quand on sait que nous sommes en stress hydrique alors que nous n’avons pas encore développé d’agriculture intensive ou d’industrie digne de ce nom…
Il existe d’autres solutions préventives moins technologiques, plus axées sur des changements comportementaux qui me paraissent un peu trop négligée la gestion de l’eau en Algérie. Ils sont, pour la plupart corolaires au concept d’efficacité hydraulique, d’une optimisation de la consommation ainsi qu’une lutte acharnée contre le gaspillage à tous les échelons du système hydraulique algérien. Nous les aborderons Inchallah dans un prochain article…