1 Décembre 2010
La 10e Conférence des parties de la Convention sur la biodiversité (CBD) se tient jusqu'au 29 octobre à Nagoya au Japon. Parmi les sujets en négociation, le partage équitable des ressources génétiques qui divise pays du Sud et du Nord. L'utilisation et de l'exploitation du patrimoine vivant, animal ou végétal, à des fins commerciales génère des débats animés alors même que la préservation de la biodiversité n'est pas encore identifiée par les entreprises comme clé dans leurs politiques de développement durable.
193 pays participent à la Conférence sur la biodiversité, qui se déroule pendant 10 jours à Nagoya. Bien que 2010 soit l’année mondiale de la biodiversité, « il ne faut toutefois pas attendre de ce sommet des avancées significatives ni des retombées très concrètes, » explique Raphaël Billé, directeur du programme Biodiversité à l’IDDRI (Institut sur le Développement Durable et les Relations Internationales).
Le bilan des objectifs, pour 2010, de préservation de la biodiversité devrait conduire à un constat d’échec; la communauté internationale n’étant pas parvenue à enrayer son érosion comme elle s’y était engagée. Un sujet devrait néanmoins focaliser l’attention des acteurs politiques et économiques, celui de l’exploitation des ressources génétiques et du partage juste et équitable des avantages résultant de leur utilisation. C’est l’enjeu du protocole « Access and Benefit Sharing » (ABS), qui constitue l’un des trois piliers de la Convention sur la biodiversité ; les deux autres étant la conservation de la biodiversité (réduction significative du rythme de perte de la biodiversité) et son « utilisation durable ».
Mesurer le coût de l'inaction
La CDB sera également consacrée à deux sujets d’actualité : le rapport de Pavan Sukdev, qui évalue, à la manière du rapport Stern sur le climat, le coût de la perte de biodiversité (et donc la valeur économique des services rendus par la biodiversité), et la future création de l’IPBES, sorte de GIEC de la biodiversité, qui recueille un large consensus parmi les pays membres de la CDB. Cette « Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques » (International science-policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services) produirait des rapports globaux et régionaux sur l’état de la biodiversité, ses évolutions et les conséquences économiques et sociales de son érosion. L’IPBES construirait, à l’image du GIEC, des scénarios à court et moyen terme, permettant aux politiques d’évaluer l’impact de leurs décisions sur les ressources naturelles ainsi que le coût de l’inaction.
La question centrale du partage des ressources
En discussion depuis le Sommet de Johannesburg de 2002, le régime international sur l’accès et le partage des avantages issus des ressources génétiques est censé être adopté cette année à Nagoya. Mais cet accord suppose de résoudre la question des financements et des compensations pour les pays du Sud, propriétaires de ces ressources. Il implique par ailleurs des secteurs d’activités controversés comme la pharmacie, la chimie ou l’agroalimentaire, accusés de biopiraterie par les communautés locales qui n’hésitent pas, quand elles en ont la possibilité, à porter plainte contre les entreprises impliquées. Le ministre indien de l’environnement Jaimram Ramesh a lui-même dénoncé les « 1500 à 2000 nouveaux brevets accordés chaque année aux Etats-Unis et en Europe, pour des systèmes de médecine traditionnelle indienne ».
De fait, comme le souligne le Collectif sur la biopiraterie, plusieurs questions clés sont encore non résolues : la définition de l’utilisation des ressources génétiques (plantes, animaux, micro-organismes), l’étendue du champ d’application de l’accord, le cadre international applicable à l’accès aux ressources génétiques, le partage des avantages avec les peuples autochtones dont les savoirs traditionnels sont utilisés par les entreprises, etc. Sans un consentement préalable éclairé de l’Etat fournisseur, et surtout des communautés concernées, l’accord serait échec, selon le Collectif. Plusieurs ONG suisses -Déclaration de Berne, Pro Natura, Association pour la protection des oiseaux ASPO/BirdLife-, le redoutent et rappellent que « les Etats de la planète ne consacrent que 8 à 12 milliards de dollars à la préservation de la biodiversité naturelle. Or, 45 milliards de dollars sont requis uniquement pour prendre soin des écosystèmes déjà classés dans des zones protégées ». On évalue aujourd’hui à 500 milliards de dollars par an la valeur des services rendus par ces écosystèmes.
Source : novethic.fr
24 octobre 2010
par Saida Nature dans : Biodiversité , trackback