ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )
8 Septembre 2013
2013 est censée être l’année de l’environnement en Algérie. Pourtant, jusqu’à ce jour, aucun de ceux et celles qui activent au quotidien pour le préserver n’oserons réfuter le fait que la politique environnementale de notre pays souffre encore de beaucoup de trop de disfonctionnements pour être vraiment efficiente et durable.
Pourtant, les mentalités évoluent progressivement. L'écologie est un concept qui fait de plus en plus d’émules parmi la jeunesse algérienne qui est, rappelons-le, largement majoritaire dans ce pays. « El Bia » devient presque une mode en Algérie. Certains s'osent même à y déceler une opportunité pour rassembler de nouveaux jeunes électeurs.
Mais malheureusement cette tendance au sein de la société algérienne tarde à dépasser le stade des bonnes intentions. Dans la pratique, le « green washing » , fait également de plus en plus recette en Algérie; c’est-à-dire l’art de travestir les pires intentions écocides derrière une cosmétique qui n’a, chez nous, de « vert » que la couleur des billets de deux milles dinars...
Pour la majeure partie des politiques algériens, les préoccupations matérielles actuelles de la population ne peuvent être entravées par des contingences environnementales supposées être de second ordre face à l’urgence de moderniser ce pays. En Algérie, bien que le développement durable soit inscrit dans la législation comme le cadre de sa politique environnementale, on tarde au fond à considérer que les aspects environnementaux, sociaux et économiques sont les sous ensembles d’une même aspiration : celle d’assurer une gestion vertueuse et pérenne à la nation.
Nos institutions s’avèrent de ce fait très timides ou peu adaptées à faire appliquer les nombreuses lois pourtant prévues par la législation algérienne afin de protéger l’environnement et la biodiversité. Pour illustrer les réserves que je me permets d’émettre à ce propos, j’aimerais tout d’abord poser quelques questions.
Pourquoi la Direction Générale des Forêts est-elle directement affiliée au ministère de l’agriculture alors qu’il est dédié à un des secteurs qui impose, avec l’urbanisation, une des plus grandes pressions sur nos forêts et maquis pourtant si prompts à nous protéger du réchauffement climatique ? Beaucoup de forestiers demandent, avec légitimité, à ce que la DGF soit un secrétariat d’Etat indépendant.
Que dire du fait que le ministère qui a pour charge de veiller à la protection de l’Environnement soit également le Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et depuis peu de la Ville* ? Un ministère de l’Environnement et de l’Ecologie ne s’erai-t-il pas plus crédible ?
Comment expliquer le fait que la Commission Nationale des aires protégées, indispensable à la bonne application de la loi relative à leur protection ne soit pas encore constituée ? De ce fait la liste des aires naturelles, parce qu’elles subissent dans la plus passive des impunités les pires dégradations d’origine anthropique, ne fait que s’allonger sans qu’aucune d’elle n’obtienne le statut d’aire protégéesalors qu’elles en ont toutes un réel besoin ?
Comment élaborer une politique environnementale vraiment efficace quand la plupart des acteurs de la préservation de l’environnement déplorent l’absence d’une banque de données nationale exhaustive et interactive, un outil pourtant indispensable en bien des aspects ?
Pourquoi, alors que depuis l’année 2000, l’Etat algérien s’était appliqué à limiter le nombre des organes étatiques dédiés à la protection de la nature et de l’environnement, de nouveaux organismes sont apparus récemment ? Cette partition de l’action gouvernementale en matière d’environnement, d’autant qu’elle n’est pas ou peu coordonnée, contribue surtout le plus souvent à ralentir les entreprises vouées au bon maintien de l’équilibre écologique de notre pays.
La protection des forêts, des zones humides, de notre littoral, des hauts plateaux et du Sahara, de la biodiversité, la lutte contre l’avancée du désert, la gestion intégrée de tous nos sites naturels ne doivent pas être assujettis à des ministères qui ne peuvent les aborder qu' avec une subjectivité trop pleine de considérations avant tout économiques. On se rappellera le cas du gaz de schiste où le Ministre du MATEV, de même que celui des ressources hydriques, n’ont pas hésité à en défendre l’exploitation en affirmant sans la moindre vergogne qu’elle ne présentait aucun danger pour l’environnement et qu'elle était vitale pour le développemement économique du pays!
De la maîtrise de notre environnement, de la gestion intelligente des richesses de notre biodiversité découle également la pérennité ainsi que la souveraineté de notre nation. Il est impensable de concevoir un avenir serein à l’Algérie sans une politique environnementale sincère tant c’est un pays menacé par l’avancée du désert, tant la beauté de ses multiples paysages et de son littoral demeurent encore largement souillées par des pollutions en tous genres. Quid de l’épée de Damoclès incarnée par le stress hydrique qui n’a pas totalement fini de peser sur le quotidien de millions d’Algériens ? En écologie, les véritables victoires se gagnent sur les siècles, rarement sur des décennies...
Les tristes constats écologiques sont là de part et d’autre du pays pour justifier la nécessité d’une nouvelle remise en question non de la politique environnementale de l’Algérie mais, surtout, des modalités de son application.
Si la sensibilisation de la population est un volet qui n’est aucunement à éluder, la formation des walis, des chefs daïras, des maires dans le domaine du développement durable doit être plus assidue et généralisée. Sans cela, il me semble difficile de faire appliquer la plupart des mesures décidées par le gouvernement. Car sans un outil administratif et institutionel suffisament adapté et formé pour cela, au contraire, cette défaillance devient un frein localement pour la mise en pratique de décisions prise à l'échelle nationale.
L’Algérie, vaste territoire tout en contrastes géographiques est un écosystème complexe qu’il faut cependant aborder avec un esprit de synthèse et la volonté d’y percevoir des enjeux nationaux. Le partage des informations et des responsabilités entre toutes les parties prenantes de ce pays s'avère un enjeu essentiel . La société civile doit être perçue non comme concurrente avec les instistitutions gouvernementales, mais bien comme capable de leur apporter un soutien substantiel à bien des égards.Il faudrait tout simplement qu'on lui donne un champ d'expression et d'action moins rébarbatif qu'il ne l'est actuellement.
Toute la société algérienne doit réaliser que l’équilibre écologique de cet écosystème est un facteur essentiel au bon développement économique et social du pays et non une lubie venue d'outre mer. En bien des points, notre pays est vulnérable écologiquement et cela risque d'empirer alors que nous sommes la génération la mieux placée pour favoriser tout le contraire afin d'éviter qu'il ne soit trop tard.
En matière d'Environnement en Algérie, il n’est plus soutenable aujourd’hui de faire semblant car demain, déjà, il sera trop tard…
*Cet article a été rédigé avant le dernier remaniement ministériel qui a vu le terme "Ville" supprimé du titre de ce ministère.