ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )
13 Décembre 2013
Plus les jours passent et plus se font récurrentes, dans la presse algérienne, les annonces confirmant un inquiétant état de fait : l’Algérie, pays en stress hydrique, est bien partie pour exploiter ses ressources fossiles non conventionnelles en utilisant la fracturation hydraulique horizontale.
Certes, la plupart des articles publiés à ce propos dans les grands médias nationaux ne partagent pas le pessimisme de ces nombreux Algériens, experts ou non, qui considèrent cette entreprise comme des plus aventureuses et bien mal avisée au regard, non seulement de l’écologie, mais également de considérations purement économiques et géopolitiques.
Il faut dire que ceux qui se sont ouvertement opposé à la fracturation hydraulique ont été rapidement taxés « d’écologistes », une voix qui ne peut être considérée par l’opinion publique algerienne que comme négligeable et dénuée de pragmatisme politique. Surtout dans un pays où l’écologie politique n’en est même pas à ses balbutiements ! Souhaiter un environnement sain, ce n’est pas militer pour l’écologisme, c’est tout simplement aimer son pays, être un patriote, un Algérien responsable vis-à-vis des générations présentes, passés et futures. Voici donc un premier voile de confusion jeté insidieusement sur les doléances de simples citoyens dont les horizons idéologiques et politiques sont aussi vastes et variés que l’écologie de notre territoire est complexe et fragile.
Le « message officiel » véhiculé dans la presse , lui, est limpide comme de l’eau de roche (ou de l’huile de schiste) : cette manne fossile ne peut être qu’une bénédiction pour l’économie algérienne. Son exploitation est aussi incontournable que les risques dénoncés sont totalement maîtrisés par l’industrie pétrochimique moderne.
Entre les lignes, certains n’hésitent pas à lire un autre aveu de taille : l’incapacité maladive de l’économie algérienne à sortir du système corrupteur de la rente fossile. Elle est pourtant sa principale source de léthargie.
A l’aune de ce 21ème siècle, le mouvement vers une mutation de nouveaux systèmes de production et de consommation plus écologiques s’avère pourtant mondialement invoqué comme une mesure inévitable, voire vitale pour la survie de l'espèce humaine.
Au centre de ces mutations, il y a deux volets encore plus incontournables : l’eau et l’énergie. Les deux se font d’autant plus rares que les Algériens en consomment de plus en plus. La question de l’efficacité, de la gestion intégrée des ressources naturelles devient donc importante à soulever dans un contexte de marché mondial et national qui a fait du gaspillage et de l’obsolescence le meilleur carburant de sa croissance continue.
Quand elle a tous les moyens de devenir une nation africaine et méditerranéenne à la pointe du développement durable, notamment grâce à ses gisements infinis en énergie solaire, son industrie et agriculture encore possibles à développer écologiquement, l’Algérie va dilapider des milliards de m3 d’eau potable pour s’assurer quelques décennies de rente supplémentaires. Au lieu d’investir, tant qu’elle en a encore le temps et l’argent, dans une véritable politique de développement des énergies renouvelables. D'optimiser en amont et en aval l’efficacité du système énergétique national, plutôt que de s'appliquer à répondre à cette augmentation de la consommation par une production sans cesse plus conséquente.
Voilà pourquoi la question de l’utilisation de la fracturation hydraulique en Algérie ne peut-être un faux débat pour quiquonque se soucie des intérêts de la nation avant de veiller à protéger ses propres deniers. De même , le choix de persister dans un système énergétique « tout au gaz » parait bientôt obsolète et ne peut se suffire de l’argument d’une consommation grimpante quand elle n’a pas encore été endiguée par des mesures limitant le gaspillage, ainsi qu’un mix énergétique donnant une place plus importante aux énergies renouvelables. Il est à vrai dire question de l’avenir du pays et des générations à venir puisque la question de l'exploitation du gaz de schiste touche, il faut encore et encore le rappeller, à deux domaines essentiels pour la survie à venir de notre peuple : l’eau et l’énergie.
A partir 2025, réchauffement climatique et « court-terme-alisme » aveugle oblige, on a prédit depuis bien longtemps à tous les pays du Maghreb une terrible sécheresse ainsi que des bouleversements climatiques importants. Tout le monde sait que les réserves de nos sous sols ne sont pas infinies. Le peak oil sera une inévitable réalité pour les générations suivantes… Que deviendra, dans un tel contexte, une Algérie appauvrie en eau, rendue incapable de produire autre chose que des énergies fossiles ?
Pourtant, les questions semblent rester sans réponses valables de la part de ceux qui ont voulue, orchestrée et se régaleront d’une telle débâcle à venir. Le projet suit son cours, les mains se serrent et se frottent aux quatre coins du club très privé des grands pétroliers de la planète. Pendant ce temps, d'autres n'auront bientôt que leurs yeux pour regarder, leurs oreilles pour entendre, mais sûrement pas leur voix pour être entendus. Aucun ou peu de débats publiques sur le sujet... La messe a été dite en haut lieu : « circulez maintenant… Laissez nous faire ! ».
J’aimerais conclure ce modeste billet par une citation que je trouve fort à propos. Lors d’un cours de Philo sur « La République » de Platon, je me souviens que, le professeur avait lâché à la classe ce jour là une de ces petites formules provocatrices dont il avait le secret quand il voulait nous pousser plus loin dans notre réflexion :
_ Mes agneaux, croyez vous vraiment que la Démocratie soit encore possible à notre époque médiatique ? Quelle est, à votre avis, la différence entre une dictature et une démagogie ? Eh bien, moi je répondrais que face à la controverse, la première vous ordonnera de fermer vos gueules, l’autre plus polissée, acquiescera à vos doléances avec un grand sourire; mais à l’évidence vous pourrez toujours , à vos risques et périls, causer dans le vide … ».