4 Juin 2012
-Quels sont les enjeux énergétiques qui suscitent aujourd’hui ce débat autour de l’isolation thermique ?
Il faut savoir qu’aujourd’hui sur le plan mondial, il y a une tendance à avoir des développements très accélérés, ce qui est à la foi positif et négatif. Sur le plan positif, vous avez des révolutions dans le domaine de la santé et du pharmaceutique, du coup l’espérance de vie est de plus importante et nous serons de plus en plus nombreux sur cette planète. Le fait d’être plus nombreux et d’avoir une concentration de population réduit énormément tout ce qui est ressources, notamment énergétiques. Vous avez un deuxième effet, sur le plan mondial, il y a de plus en plus de gens qui migrent du monde rural vers les villes. Nous avons cette tendance de création de mégapoles et de grandes villes.
Tout cela va nécessiter une meilleure maîtrise énergétique parce que nous avons moins de ressources d’un côté et nous avons des émissions de gaz à effet de serre, à cause de l’industrialisation, de la surconsommation…etc. il y a donc nécessité de réduire la consommation d’énergie en développant des énergies renouvelables, solaire, éolien, etc. du fait qu’il y aura moins d’énergie fossile disponible. C’est un problème qui nous touche de plein fouet. En Algérie, ces dix dernières années, la consommation énergétique a augmenté d’une façon phénoménale bien que nous ayons des ressources énergétiques ; on sait qu’elles ne sont pas infinies. L’Algérie s’inscrit aussi dans ce cadre mondial de devoir produire des énergies renouvelables, et on le voit très bien avec les différents projets qui sont en cours de réalisation ou ont déjà été réalisés par l’Etat.
-Avez-vous le sentiment que cette question d’efficacité énergétique est sérieusement prise en compte en Algérie ?
Prise en compte, oui. Je l’ai constaté personnellement, il y a quelques années, au niveau des foires et des conférences. L’Etat investit et lance des projets dans le sens du développement durable, donc la prise conscience existe. En revanche, sa réalisation, sa concrétisation par le biais d’un tissu industriel, ce n’est pas encore le cas aujourd’hui. Mais l’Algérie est un marché vierge et il reste énormément à faire. Nous avons un programme de construction très important et les habitudes de consommation des Algériens ont changé. Il y a dix ans, le climatiseur était un produit de luxe. Aujourd’hui, quasiment tous les édifices ont en un, y compris deux téléviseurs, deux réfrigérateurs, etc. Du coup, on consomme plus d’énergie et on a plus d’émission de gaz. Dans ce cas, il n’y a que deux options : soit investir pour avoir plus de sources d’énergie, soit réduire et maîtriser cette consommation énergétique.
-Où se situe le défi prioritairement ?
A l’échelle mondiale, mais aussi spécifiquement dans les régions d’Afrique du Nord. Les plus gros postes de consommation sont l’industrie, l’agriculture, le transport et le bâtiment et ce dernier consomme à peu près la moitié de l’énergie totale produite mondialement et localement. A peu près 43% de l’énergie va au bâtiment à cause des régulations de température. Il y a un an, nous avions fait une étude comparative sur le mode de fonctionnement d’un édifice en Afrique du Nord et les pays nordiques. Nous avons été étonnés des résultats. Au départ, nous pensions qu’en Europe, les gens s’isolaient contre le froid et chez nous en Algérie, nous devions s’isoler contre le chaud. Mais ce n’est pas du tout le cas. Nous devons nous isoler contre le froid et le chaud. Les amplitudes de température dans les régions de l’intérieur du pays ou du Sud sont de 50% à moins 10 et donc ces amplitudes nous obligent à chauffer, à refroidir et ce sont des consommations phénoménales. Aujourd’hui, nous arrivons avec une solution qui existe, qui a déjà un historique pour pouvoir limiter ces pertes énergétiques jusqu’à 60 ou 80%. Dans une maison ou un édifice aujourd’hui, toute cette énergie dépensée pour chauffer est perdue jusqu’à 80% par les murs, les fenêtres, les ventilations, le sol… L’isolation au polyuréthane constitue une très bonne solution à cela.
-Quels sont les gains en matière d’économie d’énergie ?
Disons qu’elle va réduire de plus de 50% les déperditions. Une étude allemande a comparé la consommation énergétique d’un bâtiment non isolé et le même une fois isolé sur une période précise. Nous avons vu qu’il y a eu des économies jusqu’à 80% sur les pertes. Quand vous parlez de 3 millions de kwh par édifice, c’est énorme si on regarde ça sur l’échelle d’une ville ou d’une région.
Chez nous, ça peut être encore plus pare que pour chauffer chez nous, on utilise en général le gaz. Vous avez toute cette partie chauffage au gaz qui n’apparaît pas dans les graphiques de la consommation, ce qui laisse deviner que le gain pourrait être plus important. Aujourd’hui, il y a une nécessité de maîtriser l’énergie et nous savons qu’avec cette solution, nous pouvions avoir des bénéfices très importants.
-Pensez-vous que ces bénéfices peuvent amortir les coûts engendrés par l’exigence de l’isolation ?
Effectivement, le coût est à tous les niveaux. Le fait d’investir dans des projets énergétiques c’est de l’argent qu’il faut éviter de gaspiller. Si vous mettez de l’argent pour développer un secteur de production d’énergie renouvelable, ce serait dommage d’en perdre 80% dans le bâtiment. C’est pour ça que nous parlons d’efficience énergétique, c’est-à-dire avoir le maximum de rendement pour un minimum de coût. Rendre cette source d’énergie optimale en dépensant le moins possible simplement en isolant l’habitat. Chose qui n’est pas faite. Nous avions fait une étude il y a un an et demi et nous avions vu que sur le parc immobilier neuf, il y avait seulement 2% des édifices qui étaient isolés et encore, pas complètement. Ils isolaient uniquement les terrasses. Il y a énormément à faire.
-Comment un particulier peut-il être convaincu d’intégrer les coûts supplémentaires d’une isolation thermique ?
Aujourd’hui, en Algérie, le prix de l’énergie n’est pas très élevé, mais je n’imagine pas que ça va durer parce que l’énergie reste un produit subventionné.Je pense que les ménages vont regarder de plus en plus près leur dépense en terme d’énergie et arriver à un moment, s’ils se rendent compte, qu’ils peuvent faire énormément d’économies sur ces dépenses. Ils le feront. Et je pense que les particuliers prendront cette décision. Des études ont été faites et sur le coût de construction d’un édifice, l’isolation en polyuréthane c’est de l’ordre de 1%. Ce n’est quasiment rien et il existe en plus différentes manières de l’appliquer aussi bien pour les bâtiments neufs que pour les anciens bâtis.
Quand on isole aujourd’hui, c’est davantage chez les particuliers qu’on le fait, ce n’est pas encore les édifices publics. En Algérie, le tissu industriel existe déjà et nous, nous ne sommes que des fabricants de matière première que nous fournissons aux industries locales, que nous aidons par ailleurs à se développer et à faire du transfert de technologie pour qu’elles puissent produire des matériaux isolants. Il y a un petit tissu, mais pas encore de filière développée ou d’organisation qui permette d’homogénéiser des actions.