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Nouara Algérie

ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )

"Là où les forêts se meurent..." Par Karim Tedjani

Désertification de Guerbes Sandhadja 2

Sanhadja (Ben Azzouz-Skikda)  est devenu en l'espace de quelques décénies un petit désert à quelques kilomètres des côtes...

 

 

Quand une forêt se meurt en Algérie,  ce sont également les arbres immatériels  qui racontent l’histoire de ce territoire et de son peuple qui se mettent  alors à s’éteindre dans le cœur des Algériens. Ceux et celles  à qui les anciens ont laissé toute cette luxuriante végétation  en  héritage, pour témoignage millénaire  de leur bienveillance envers  les  générations futures.

Tous les Algériens ont un arbre de famille. Beaucoup même, ont des arbres dans leur famille, tant ceux  de leur quartier, leur jardin, leur douar, leur oasis sont pour eux  des repères spaciaux, temporels et culturels. Souvent, quand on abat un arbre dans notre pays, s’il n’y a pas foule pour s’y opposer officiellement, il y a  toujours des gens attroupés autour pour verser des larmes ou s’offusquer de les voir disparaître ; comme si on avait attenté à la vie d’un voisin ou d’un membre de leur famille…

J’en connais même un, grand chercheur à l’institut national des recherches forestières, le Pr.  Messaouden,  qui m’a  raconté comment  il a  pu  déterminer l’année  exacte de sa naissance  en comparant les témoignages de ses parents, à propos du temps qu’il faisait quand il est né,  avec   ceux laissés sur les sillons des chênes de sa région qu’il a pu étudier.

On lui avait dit qu'il était  né une année où l'hiver était particulièrement  neigeux et rigoureux. Il pu retrouver la trace de cette saison  grâce aux sillons inscrits sur des d'échantillons de troncs d'arbres prélévés dans  sa région natale. La largeure de ces derniers dépend notamment des  climats saisonniers endurés par un arbre au fil du temps. Le résultat de ses recherches fut sans appel, l'année civique  de sa naissance ne pouvait être valide;  car les arbres lui ont révélé qu'il n'y avait pas eut de neige l'hiver de sa date de naissance officielle! 

Non contents de nous  apporter protections,  oxygène et eau,  les arbres nous racontent. Ils sont les gardiens de biens des trésors en Algérie.  

On dit, « quand une forêt meurt, un désert prend vie… »

Il en va de même pour l’esprit d’une société. Quand elle laisse ses forêts en pâtures aux appétits humains,  ainsi qu’à la merci des aléas climatiques. Elle s'offre ainsi et  elle même au désert. 

L’arbre est un élément fondateur de la matrice culturelle algérienne. Beaucoup de nos ancêtres ont vécu dans de vastes et denses forêts.  Dans chaque région, tel ou tel douar ou village, il y a  ces anciens pour nous rappeler les  promesses qu’il ont eux même faites un jour à leurs parents qui eux-mêmes tenaient ces prescriptions de leurs ancêtres  : respecter et protéger les arbres de notre pays.

A quoi pourrait donc ressembler  les  Kabylies de Tizi Ouzou  à Skikda sans leurs oliviers ou leur chènes centenaires? La culture des gens d'un Atlas privé de ces cédres et pins endémiques? El Oued ou Biskra  sans leurs  palmeraies?  

Le desert...

Là où une forêt est en péril, en Algérie,  il y a   heureusement des jeunes et moins jeunes qui se sont organisés pour remédier à un tel désastre ; souvent  avec la même passion  qui devrait habiter toute personne travaillant à la Direction Générale des Forêts. Il y  a aussi des chercheurs passionnés et qualifiés, des forestiers qui tentent, tant bien que mal de  faire leur métier, malgré un statut et des conditions encore rarement à la mesure  de l’importance de leur travail pour l'avenir du pays. Il ya aussi  des journalistes consciencieux  pour parler de l’état de grande fragilité de nos forêts…

L’urbanisation anarchique, la spéculation immobilière frauduleuse qu’elle entretien, certains aspects aberrants de la lutte contre le terrorisme dans notre pays, une agriculture de plus en plus  toxique pour les sols et exerçant une pression de plus en plus nocive sur les forêts, le changement climatique, la pollution, l’extinction de certaines espèces avec lesquelles ils sont en symbiose, la faible éfficience du système administratif, la liste est longue pour évoquer les origines  de la dégradations de nos forêts  par le développement économique du pays .

 

Pourtant, parce ce que, rappellerons-le,  « là où une forêt se meurt, un désert prend vie », ce développement économique ne saurait se faire sans une couverture végétale suffisante en qualité et en quantité pour assurer tous ses rôles écologiques  de rempart contre le désert mais aussi   de stabilisateur  climatique et de régulateur des ressource hydriques.  Tout cela s’opérant sous l’effet de la photosynthèse, c’est-à-dire grâce au soleil, une énergie renouvelable et propre. Il faudrait un nombre considérable de complexes industriels forts coûteux et énergivores, des technologies très pointus, pour effectuer  ce que les  arbres accomplissent  au quotidien  pour le plus grand bien de la vie sur Terre.

Si les bonnes volontés s'activent, les résultats sont encore  trop timides face à l'ampleur croissante des préssions anthropiques et climatiques sur nos forêts. 

On parle souvent du barrage vert comme le meilleur obstacle contre l’avancée du désert. On en parle seulement? 

Mais, au regard de la relation  qui existe entre un écosystème et une économie sociale, ce barrage vert doit  d’abord puiser sa source dans la Culture. Il faut semer des arbres dans la tête des gens, avec des racines fortes  et des ramifications étendues, baignant dans un substrat social où le respect de l’environnement  est un droit ainsi qu’un devoir qui incombe à l’ensemble de la société algérienne.

Sinon, sans faire renaître de ses cendres la culture de l’arbre en Algérie, comment semer la bonne essence  au bon endroit ? Comment assurer une veille intergénérationnelle pour le maintien et l’optimisation de nos couverts forestiers ? Sans une vrai culture de l’arbre, on plante souvent un pin là où  un chêne aurait été plus approprié. On organise la prolifération des eucalyptus, et tout cela sans un véritable suivit  scientifique ou programme d’entretien de  longue durée. Comment intégrer les changements climatiques  dans la gestion de  nos forêts ?

La DGF, le monde associatif sont les principaux acteurs capables de cette renaissance encore possible. Il faudrait que l’Etat stimule la rencontre entre ses deux pôles d’actions et de sensibilisations pour que nos forêts reviennent à la vie.  

Cette émulation entre  citoyens responsables et  professionnels de la forêt  commence d’ailleurs à se faire naturellement,  j’en ai été bien des fois témoin. Mais  cela suffira-t-il à protéger et cultiver nos forêts? A la vitesse où elle se fait actuellement, j'ai bien peur que non. 

Celui qui plante un arbre sème potentiellement  une forêt autour de lui . Ceux qui plantent ensemble une forêt, eux,  sèment des générations  pour leurs  pays. Voilà un autre de ses adages universels qui devrait inspirer  un nouveau développement  pour  notre Algérie. 

 

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