23 Décembre 2011
Le ministère de l'agriculture prévoit une station de 223 000 m3/j, l'Office national de l'eau potable une autre de 100 000 m3/j. Le montant de l'investissement est de 2.5 milliards de DH pour le projet de l'agriculture.
Le Maroc a choisi le dessalement d’eau de mer comme une des solutions retenues pour parer au déficit en eau dans la région du Sud. Après l’exploitation par l’Office national de l’eau potable (ONEP) d’une dizaine de petites stations d’une capacité totale de 35 000 m3 par jour, le pays s’apprête à lancer les travaux de réalisation de grandes infrastructures dans ce domaine dans la région du Souss. Il s’agit de deux projets, l’un à usage agricole initié par le ministère de l’agriculture et l’autre par l’ONEP. Les études de faisabilité viennent juste d’être finalisées.
Au total, les nouvelles installations auront une capacité de production de 323 000 m3 par jour. Plus des deux tiers sont destinés à l’activité agricole, soit 223 000 m3/j. Certes, les besoins en eau potable sont immenses et les réserves des barrages alimentant la région ne sont pas maîtrisables. Mais c’est au niveau de l’agriculture, qui constitue la principale activité économique de la région et le premier fournisseur du pays en fruits et légumes, que les besoins se font le plus ressentir. De plus, les études ont montré des résultats encourageants pour l’eau dessalée destinée à l’usage agricole.
Le Souss veut éviter les erreurs faites sur la zone côtière de Oualidia à Dar Bouazza
Le choix de l’eau dessalée dans le domaine agricole au Souss est justifié économiquement, et ce, pour deux raisons. D’abord, le développement spectaculaire des moyens technologiques dans le domaine qui a permis de réduire considérablement le coût élevé de l’eau dessalée, surtout à usage agricole. Alors que le coût de revient était de plus de 20 DH le m3 il y a quelques années, il se situe actuellement à seulement 10 DH.
Ensuite et surtout, le déficit en eau dans la région du sud (à partir du Souss) devient de plus en plus inquiétant, à tel point qu’il remet en cause l’avenir d’une activité agricole en pleine expansion ces dernières années. «L’eau est notre principale préoccupation», souligne un membre de l’Association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (APEFEL), avant d’ajouter que «nous faisons tout pour éviter le scénario catastrophe qu’a vécu la région côtière allant de Oualidia à Dar Bouaza». Allusion faite à l’invasion de la nappe phréatique par l’eau de mer qui «a transformé la plus grande zone de production maraîchère au Maroc en une région peu fertile à cause d’une surexploitation durant les années 70 et 80», déplore ce même producteur exportateur.
La plupart des producteurs exportateurs se sont montrés enthousiastes pour ce projet et se disent prêts «à payer de 7 à 8 DH le m3 pour s’en procurer», signale un membre de l’APEFEL.
Le projet de l’ONEP est à un stade avancé
Malgré cet engouement, la réalisation de ce projet n’est pas pour demain. Elle attend en fait l’aval du ministère des finances qui dépendra, lui, bien évidemment, de l’accord du futur gouvernement. Car il s’agit d’une enveloppe de 2,5 milliards de DH qu’il faudra mobiliser. C’est l’estimation faite par les experts qui ont élaboré les études pour la mise en place de stations de dessalement de l’eau de mer ainsi que des réseaux d’irrigation.
D’après le calendrier initial de la commission mise en place au niveau de la région du Souss pour suivre ce dossier, le chantier devrait être lancé en 2012, après appel d’offres, et la station opérationnelle en 2014, selon des sources proches du dossier. Et c’est l’option de partenariat entre le public et le privé qui a été retenue pour la réalisation et la gestion de ce projet.
Quant au chantier de l’ONEP, il porte sur la réalisation d’une station de 100 000 m3 de capacité journalière. «A cette taille, la rentabilité économique du projet devient beaucoup plus intéressante puisque le coût de revient baisse considérablement», précise Saïd Berrada, directeur technique et ingénieur à l’ONEP. L’office qui a accumulé une riche expérience dans le domaine, notamment pour l’approvisionnement de ses clients dans le Sud, fournit 80% de la demande de la population de Laâyoune (environ 200 000 h) en eau dessalée et 100% de celle de Boujdour. Mais il la paie à 14 DH le m3, le système de péréquation ainsi qu’une optimisation des coûts à l’échelle nationale lui permettant de baisser le prix au consommateur. Aujourd’hui, il veut passer à la vitesse supérieure.
«Le projet vise une capacité de production de 100 000 m3/j dans sa première phase extensible à 100 000 m3/j pour couvrir les besoins de Souss-Massa jusqu’à 2030», indique M.Berrada. L’ONEP, qui privilégie la formule de gestion déléguée sur 20 ans, attend la remise des offres des sept entreprises préqualifiées. Le coût de cette infrastructure n’a pas encore été arrêté.
La capacité mondiale de production d’eau potable est de 500 millions de m3/j, dont 75% sont destinés à la consommation humaine et le reste à l’usage industriel et agricole. 8% de cette quantité, soit 40 millions de m3, sont produits par les 15 000 unités de dessalement de l’eau de mer (30 millions de m3/j) et de l’eau saumâtre (10 millions de m3/j) réparties dans 120 pays.
Dans certains pays du Golfe, 60% des besoins en eau douce sont satisfaits par la technique de dessalement de l’eau de mer. La plupart des Etats du pourtour méditerranéen ont opté pour cette solution pour faire face au déficit en eau. L’Algérie dispose d’une capacité installée de 600 000 m3/j, l’Espagne 2,5 millions m3/j, la Libye 900 000 m3/j et Malte 150?000 m3/j où le dessalement offre 60% de l’eau potable de l’île.
Hakim Challot. La Vie éco
www.lavieeco.com