25 Mars 2013
Première partie : « Le mouvement durable » de Nathalie Naïmi
Des réseaux sociaux virtuels aux actions civiles concrètes
Le printemps dernier, à Alger, j’ai enfin eu l’occasion de rencontrer« en chair et en os », Nathalie Naïmi, une bordelaise d’origine algérienne avec qui, sur le net, j’ai eu beaucoup échanges très stimulants à propos d’écologie et d’environnement en Algérie. Cela faisait plus de deux années que nous avions entamé « virtuellement » un long débat où nos avis, s’ils se rejoignent souvent sur le fond, n’en appréhendent pas moins la forme avec des points de vus assez différents. L’un comme l’autre, nous partageons cette même passion pour notre pays d’origine. Cependant, nos parcours de vie, notre expérience professionnelle, ainsi que nos actions ne sont pas les mêmes. L’occasion de partager de vive voix, et qui plus est en compagnie de notre ami commun Mohamed Amir, lui-même très impliqué dans la vie associative et les problèmes d’environnement en Algérie, cette opportunité ne pouvait être qu’une formidable source d’inspiration et de motivations.
Nous avons bien entendu abordés de nombreux sujets, notamment à propos du travail de Nathalie dans sa wilaya d’origine, Oran, où elle a entamé une collaboration avec divers acteurs politiques et civils afin de poser les bases d’un développement durable au sein de la société algérienne. Ainsi, avec une approche durable, elle participe à la mise en valeur de plusieurs espaces publiques dans cette ville. C’est avec beaucoup d’humilité et de convictions que cette jeune femme m’a exposé sa façon d’aborder ce sujet en Algérie. « Malgré les nombreuses difficultés, les freins sociaux culturels et administratifs, je pense que chaque projet développé chez nous dans ce sens, participe à la mise en route d’un mouvement plus ample et durable. Il ne faut pas se décourager, faire de échecs du passé et du présent les bonnes leçons à tirer afin d’atteindre ses objectifs pour l’avenir » voici comment je pourrais résumer le message que semble avoir voulu me transmettre Nathalie.
Quand Nathalie parle de « Mouvement Durable » en Algérie
J’ai le souvenir qu’elle utilisa plusieurs fois dans la conversation l’expression « mouvement durable ». Notamment pour répondre à mes réserves concernant le bien fondé du terme « développement durable » qui me parait quelque peu une façon de continuer à parler de croissance continue dans un espace physique, la Terre, limité en espaces ainsi qu’en ressources naturelles. Nathalie ne voit pas du tout les choses de cette façon. Pour elle, dans la pratique, la définition anglo saxonne, « sustainable » (soutenable) est plus appropriée. « Il faut trouver les moyens d’un développement humain soutenable pour la nature et l’environnement », c’est ce qui m’a semblé ressortir de son discours.
Pour cela, la notion de mouvement, c’est-à-dire de dynamique doit être soutenue dans la durée. Comme beaucoup d’experts sur le sujet, elle ne peut que déplorer la défaillance de nombreux suivis dans une multitude de process aux services d’intentions souvent louables à l’origine. C’est à vrai dire, le manque de vision à long terme qui rend les choses assez difficiles quand on veut appliquer un programme durable dans la société algérienne. Car elle est très pragmatique et ne croit que ce qu’elle voit au présent tant, au fond, elle méfie toujours un peu de l’avenir. « El Mektoub », le destin, étant le rempart absolu à toute velléité de remise en question des contradictions aigues dans laquelle ce pays semble parfois un peu trop souvent s’embourber. Tout comme moi, cette jeune « militante », au sens civique du terme, reste cependant convaincu que seul un « mouvement durable », c’est à dire conduit par des acteurs persévérants pourra aboutir à une mutation progressive de la société algérienne vers un modèle moins polluant, plus en accord avec son formidable environnement où le climat et la biodiversité sont autant rares que généreux.
Une « militante » très professionnelle qui aime voir les bonnes idées se réaliser.
Il serait bon de préciser que Mlle Naïmi est également très impliquée dans ce domaine à Bordeaux, sa ville française natale. Au point même d’en avoir fait son métier. Elle a joué un rôle non négligeable dans l’application de l’Agenda 21 dans sa région. Le jardin public des « Coquelicots » auquel, à titre personnel, elle a activement participé, est également une très belle réussite. Ses collaborations l’ont même conduit en Afrique subsaharienne où elle a pris part active à des opérations de reboisements. Ses grandes qualités de gestionnaire, sa ténacité, ses implications et convictions sociales à l’échelle internationale sont autant de choses qu’il faut se rappeler quand on écoute ce petit bout de femme vous expliquer d’une voix très douce de qu’elle manière elle conçoit et aborde chacun des projets de développement durable auxquels elle participe. Ses actions locales semblent elle-même inscrites dans une perspective globale plus « philosophique » qu’elle n’hésite pas à mettre à jour au fil de ses nouvelles expériences sur le terrain.
Mohamed, qui était présent lors de cette rencontre, est un jeune informaticien qui a la sérieuse ambition de créer une ferme bio dans la wilaya d’Alger. Il pourrait témoigner de la précieuse assistance dont il fait régulièrement l’objet de la part de Nathalie. Je connais personnellement d’autres personnes qui pourraient en faire autant. En ce qui me concerne, le point de vue de Nathalie a toujours été un bon repère. Le rayonnement durable des actions de Nathalie sont, à ce qui me semble, très proches de ce que ce terme incongru « développement durable » doit réellement véhiculer dans les esprits et encore plus inspirer dans les réalisations qui en portent l’étiquette.
Eviter les faire semblants, accompagner les projets vers le vrai succès
Sinon, sans une approche durable, il ne peut y avoir de sincérité réelle de la part des acteurs et des décisionnaires de notre système national. Cela voudra dire que le green washing, c’est-à-dire le faire semblant écologique, sera à ajouter à la nombreuse liste des impostures possibles dans un pays qui ne réalisera pas que l’environnement et la santé publique sont indissociables du bien-être social garant lui-même de l’implication du citoyen dans la vie politique de son pays. Seul un mouvement durable alliant la parole à des actions concrètes pourra venir à bout du fatalisme et du laisser faire dans lesquels s’est installé de nos jours la société algérienne toute entière. Là aussi nous sommes également d’accord pour le déplorer. Beaucoup de choses ont été annoncées, de programmes mis en route et pourtant c’est toujours le pétrole qui fait la pluie (noire) ou le beau temps (brûlant) dans un pays qui se désertifie inexorablement faute de renouer avec les aspirations innovantes de ses origines…
Un mouvement durable peut en entraîner parfois un autre
Voilà, comment, on peut, à la simple terrasse d’un café algérois, rencontrer une idée, une perspective qui peut vous donner une énorme envie de la développer avec votre propre sensibilité. Longtemps après cette rencontre, cette expression, « mouvement durable » est revenue souvent hanter mon esprit. Moi qui me suis lancé, à vrai dire , un peu à l’aventure et depuis bientôt presque quatre ans dans l’expérience « Nouara », je ne peux qu’ adhérer à ce postulat parce que je me suis lancé dans un travail de fond où celui qui plante une graine ne s’attend pas à vivre assez longtemps pour la voir devenir un arbre mais qui fera tout pour l’y aider.
C’est pourquoi, je me permets de vous inviter à m’accompagner dans quelques modestes réflexions sur le sujet dont ce billet peut faire non seulement office d’introduction mais aussi de première partie car il rend hommage à celle qui m'a donné envie de "philosopher" un peu sur le sujet.
Il est évident que j’en profite pour remercier très chaleureusement Nathalie pour ses brillantes visions et son dévouement sans faille pour son pays d’origine. Il faut également encourager Mohamed Amir dans ses projets de ferme bio et rappeler que beaucoup de jeunes Algériens comme lui partagent cet engouement pour la nature et l’environnement. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à en témoigner dans les messages qu’ils m’envoient et leur actions sont de mieux en mieux organisées. C’est à eux également qu’il faut dédier cet article.
A suivre :
« Qu’est-ce qui diffère, au fond entre un mouvement et un développement ? Je suis persuadé que c’est la première question qu’il faut se poser. Puis, il serait bon de constater qu’il existe des mouvements durables qui n’ont pas forcement besoin de s’étendre dans leur environnement pour rayonner bien au-delà de leur périmètre d’action. Enfin, il est possible d’envisager certaines problématiques environnementales au regard de cette perspective, nous ferons un peu d’utopie pour parler d’environnement urbain et de la place de la culture environnementale afin d assurer un suivi intergénérationnel à un mouvement social durable pour une Algérie saine et prospère qui veillera sur son environnement comme on veille sur un trésor national, au même titre que les richesses du Sahara. La suite très prochainement…. »