ECOLOGIE ET ENVIRONNEMENT EN ALGERIE (Une revue de web de plus de 4500 articles )
3 Février 2014
Première partie : « Tout ce qui nous entoure et nous influence...»
« Tout ce qui nous entoure et nous influence », voilà la définition la plus conventionnelle de cet Environnement qui s’invite chaque jour un peu plus à la Une des médias du monde entier. Ce « nous », n’est pas innocent. Il suggère la prédominance de notre espèce sur « ce qui [ l’] entoure ». Un environnement humanisé complètement centré sur la toute puissance supposée de l’Homme sur la Nature.
L’Homme et la Nature ne sont plus seulement d’égale à égal dans la logique d’une telle conception. Non, on pourrait presque penser que, de nos jours, l’Homme est la Nature, tant il en a colonisé la plus grande partie à travers le globe.
L’Homme sans la Nature ? Qui sait, cela est peut-être envisageable. En « créant » son propre environnement, ou pour être plus précis, son environnement propre (à lui), il s’est, en quelque sorte, réinventée une nature. L’Homme sans la Nature ? Impossible à envisager, ce sera elle ou l’Humanité ! Il n’est pas rare de lire, en filagrammes de l’activité humaine des temps modernes, de telles considérations se forger dans la psyché collective de nos sociétés industrielles. A présent que les gènes et les mollécules sont brevetées, tout est possible; il y a peut-être un monde à inventer ce disent ceux là même qui auraient fondu comme des prédateurs sur la terre sauvage d'Amérique, d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et même d'Europe si cela était possible de remonter le temps pour le refaire avant leurs ancêtres. La société, comme l'océan, a ses requins et ses pieuvres; avant de les juger, il serait bon de se demander pourquoi ils ont leur utilté. Comme le Diable de la littérature , ne font-ils pas avant tout que "répondre à la demande"? Les failles de nos systèmes démocratiques sont devenues de véritables usines à fabriquer des tentations.Il n'y a plus qu'à se baisser pour se servir . Doit-on blâmer un requin d'être attiré par l'odeur du sang puisque telle est sa nature dans l'ocean? Pourqu'il n'y ait plus de requins autour de nous , il faudrait alors changer d'écosystème. Mais alors nous ne serions plus des sardines? Qui sait, par nature nous deviendrions des moutons dans un monde de loups.
C'est "nous", la société toute entière qu'il faut d'abord changer, pour bien vivre notre environnement. Car la Nature, elle, même sans l'Homme, est déjà en train de changer autour de nous...
Chacun pour soi et puis aussi pour tous...Cette solidarité est née de l'adversité face à une Nature Sauvage qui nous a rarement fait de cadeaux gratuits. N'allez pas faire de moi un Rousseausiste en utilsant un tel champ lexical, d'autant que j'ai déjà briévement écrit à propos d'un contrat social. C'est que je n'ai trouvé cet esprit de Touiza (comme on dit chez nous) seulement que dans les campagnes isolées en pleine nature sauvage , qu'elles soient d'Europe ou du Maghreb. Certes je n'ai pas connu la vie des mines ou des usines où, une autre solidarité s'est développée également autour du concept de "camarade prolétaire". Mais ma couleur personnelle n'est ni le rouge et encore moins le vert, j'aime toutes les couleurs. "Si elles existent, c'est qu'elles nous sont toutes indispensables", vous répondrait mon grand ami et longtemps hermite, Ahmed el Nour, un des personnage haut en couleur, justement, qui vit à Guerbes depuis toujours.
J'entends par là que, sans la nature terrestre , et ses régles qui, pour ma part, répondent à une logique qui nous dépasse de loin, il y aura une bonne et une mauvaise part de l'homme sauvage qui vont disparaître de nos matrices sociales. Etre plus moderne que moderne, c'est justement, à mon humble avis , réussir l'alchimie qui saura libérer la nature sauvage de ses pires vices, de ses traumatismes millénaires face à des environnements longtemps hostiles à la présence de l'Homme sur Terre. Car je ne suis pas de l'Ecole de Rousseau, à l'homme naturel, moi je préfère l'Homme sauvage, c'est à dire barabare à la tyrannie, mais qui n'est pas non plus un bisounours. C'est un homme libre...
Un Homme urbain ou rural, mais, rarement plus, il n’existe d’hommes et de femmes vraiment sauvages sur Terre. Tous les peuples du monde qui pratiquent encore une certaine « sobriété heureuse » (dixit P.Rabhi) en perpétuant la tradition d’une humanité inclue dans la Nature, sont à présent dits « primitifs » ou « sauvages ». Maintenant c’est l’Homme industriel qui inclue la Nature dans son environnement. Du jour où le premier pas européen a foulé la dernière la terre sauvage , quand l’histoire moderne a commencé son lent , très lent déclin, et que la "néo-modernité" a pointé le bout de son nez colonisateur sur le monde. Cela prendra beaucoup de temps avant d’en arriver à assister, comme nous, à l’Histoire Moderne qui se meurt définitivement sous nos yeux.
Les enfants du « Paradis Oublié » ont depuis la vie dure où qu’ils se trouvent sur la Planète. Avec leur extinction progressive, c’est aussi leur environnement qui disparait, la Nature. Une nature plus humaine aussi. L’humilité n’est plus de rigueur vis-à-vis de « nos ancêtres[les sauvages] », à peine un semblant d’attendrissement, lors d’expositions très « modernes », où l’on s’extasie sur l’authenticité de ces « peuplades » tout en dégustant des petits fours et du champagne la plupart du temps industriels.
Le mythe du bon « sauvage », campé dans son île où sa forêt vierge de toute dégradation d’origine humaine, n’est pas non plus une image pertinente. Dans son ouvrage « Ecocide : une brève histoire de l’extinction de masse des espèces », dont le titre est à lui seul parlant, rappelle l’essayiste américain Franz J. Broswimmer que l’humanité n’en n’est vraiment pas à ses premières heures écocidaires. Elles seraient, selon lui, préhistoriques et tous nos archétypes du sauvage « écolo de nature » sont à prendre avec une extrême précaution. Toute présence de la vie, humaine ou non, au sein d’un espace physique, implique une répercussion sur l’environnement où elle évolue. La plupart même des grandes civilisations anciennes, selon lui et beaucoup de ses pairs, n’ont pas survécu à leurs développements. Du jour, où, ils n’ont plus été suffisamment soutenables par leurs environnements. A cette dégradation environnementale, on trouve également, le plus souvent, comme écho, un déclin des valeurs fondatrices de ces civilisations ou peuples.
A force de nourrir un goût naturel pour l’expansion et l’appropriation de son environnement, les choses prennent cependant des proportions plus alarmantes à notre époque dédiée à la vitesse et au décalage horaire. Voilà ce qui a changé entre l’homme « civilisé » et le sauvage, au sens qui a fait de la nature sauvage la matrice de son identité collective : la vitesse et la démesure à laquelle les choses se passent à notre époque.
Depuis Darwin, l'homme a été célébré comme l'oeil de la pyramide alimentaire, le grand prédateur ancestral; surtout pour justifier la modernité, c'est à dire une sauvagerie civilisée, comme un prolongement et une canalisation de cette nature sauvage humaine . Entre le bon sauvage forcement bon et la brute ignarde qu'il faut sauver du sous developement, peut-être a-t-on oublié qui étaient vraiment cet homme et cette femme sauvages. "Vendredi ou l'enfant sauvage" est , à ce propos un roman qui aura marqué mon esprit par son objectivité ainsi que la finesse de sa vision de notre modernité transposée à travers les douces déroutes d'un étrange Robinson Crusoé et de son encore plus intrigant compagnon, Vendredi.
Je me souviens, à ce propos, avoir été fort déconcerté d’apprendre de la bouche même de ma grande tante Nouara, qu’à la place de la ferme dans laquelle j’avais tant appris à aimer la nature, s’entendait jadis une immense forêt de chênes lièges.II y a à peine de cela 50 ans. Elle a été défrichée en grande partie par les paysans qui s’étaient installé à Guerbes depuis moins d’une centaine d’année, pour la plupart. La ferme où vit Nouara , qui se trouve aux abords très proches des côtes de la baie de Guerbes, a, parait-il, été un temps un camp de prisonniers où de nombreux algériens servaient d’esclaves pour la récolte du liège et la culture de l’olive.
Cependant, souvent, en palabrant avec les anciens de la région, j’ai entendu dire que la forêt était depuis hantée par des esprits chargés de la protéger. Un vieux marabout, dont j’ai oublié le nom, aurait même avertis tous paysans, il ya de cela quelques générations, qu’ils pouvaient certes récolter du liège et même couper certains arbres, mais qu’une malédiction s’abattrait sur quiquonque le ferait plus que ce que la forêt ne pourrait le supporter. Dans un pays colonisé, qui sait pourquoi on vous demande de respecter la forêt..
N'oublions pas aussi que l'écologie occidentale a longtemps été un argument pour justifier la colonisation. Heureusement beaucoup de choses ont changé depuis , mais un certain néo colanialisme persiste, ce serait malhonnête de ne pas le préciser.
Mais, de nos jours, les prédications ne suffisent même plus, d'autant qu'elles ne furent pas toujours anodines, je l'ai appris en étudiant l'histoire même de ma famille dont certains moqquadems (heureusement ils ne furent pas légion) ont apparemment trahi l'honneur de leur confrérie en pariant sur l'envahisseur dans beaucoup de pays d'Afrique.
La forêt et tout le reste de la biodiversité sont menacés de disparaître à Guerbes. Comme c'est un cas d'école que j'observe depuis plus de trente ans, je prendrais souvent cette région pour exemple lors de mes prochains articles dédiés au même sujet que ce dernier.
Les fautifs de cette tragédie écologique? On aura vite fait de pointer du doigt les paysans qui déciment leur environnement pour cultiver de la pastèque hybride. Mais si, comme moi, vous connaissez la rudeur de leur vie , l'extrême isolement dans lequel ils évoluent, vous comprendrez peut-être que c'est avant tout leur ghetto rural qui a fait d'eux des colons sur leur propre terre...
Comment peuvent-ils respecter un environnement qu'ils n'ont plus la possibilté de bien vivre ? Et si c'était cela le fondement d'une écologie algérienne?