Auteur(s) : Abdelkader Rouabhia, Fethi Baali, Nacer Kherici, Larbi Djabri , Université de Tébessa, BP 34–A Nahda–Poste, 12004 Tébessa Algérie, Université d’Annaba, BP 12, Annaba 23000 Algérie, Université d’Annaba, 11, rue Assla Hocine, Annaba 23000 Algérie. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Résumé : La présente étude traite de la vulnérabilité et des risques de pollution de la nappe des sables miocènes de la plaine d’El Ma El Abiod (Algérie), menacée par de nombreux foyers de pollution (urbanisations, industrie, élevages, décharges sauvages, etc.), qui se sont multipliés dans la région en dehors de toute mesure de protection de l’environnement, et en particulier des ressources en eau. Celles-ci sont exposées à des risques potentiels d’altération continue ou épisodique, et seront menacées davantage dans l’avenir par l’insuffisance des volumes de recharge (climat semi-aride et leur surexploitation). La méthode utilisée pour entreprendre cette étude repose sur le recensement des causes de pollutions potentielles ou réelles en tenant compte de plusieurs facteurs, tels que la lithologie, la piézométrie, l’hydrochimie et les indices de contamination. L’analyse de la carte de vulnérabilité a permis de distinguer trois zones de degrés de vulnérabilité différents. Les zones de faible et de moyenne vulnérabilité occupent respectivement 30 et 45 % de la surface totale de la plaine, alors que les zones à forte vulnérabilité occupent 25 % de cette surface totale. |
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ARTICLE
Auteur(s) :, Abdelkader Rouabhia1, Fethi Baali1, Nacer Kherici2, Larbi Djabri3
1Université de Tébessa, BP 34–A Nahda–Poste, 12004 Tébessa Algérie
Région d’étude et méthodologie
Présentation de la région d’étudeEl Ma El Abiod est une plaine de 420 km2, située au sud–est de la ville de Tébessa, au nord–est de l’Algérie. Elle fait partie du bassin–versant du chott Melhrir (( figure 1 )). Elle se trouve au centre d’un synclinorium limité par l’anticlinal de Tnoukla et Bouroumane, au nord, qui constitue la limite entre deux grands bassins–versants – celui de la Medjerda qui s’écoule vers le nord et celui de l’oued Melhrir qui s’écoule vers le sud, et par l’anticlinal de Boudjlal et E’Dlaa, au sud. La topographie est presque régulière, la plaine est légèrement inclinée vers le sud. La région est soumise à un climat semi–aride. La moyenne annuelle des précipitations est de l’ordre de 220 mm, tandis que l’évapotranspiration réelle, estimée à partir du bilan de Thornthwaite, et l’infiltration, y sont respectivement de 210 et 10 mm/an. La prospection dans la région a commencé dans les années 1970 avec la réalisation d’une prospection géophysique et de plusieurs forages profonds. Il s’agit d’un haut plateau, où on distingue deux grands ensembles géologiques : les affleurements de bordure d’âge Crétacé et les formations d’âges Miocène et Quaternaire. Les premiers constituent les zones d’alimentation de la nappe contenue dans le second ensemble formé de sables et de grès. L’épaisseur des formations aquifères varie d’est en ouest de 20 à 200 m (( figure 2 )) avec des transmissivités oscillants entre 10–3 et 10–2 m2/s.Méthodologie et conditions analytiquesSur un ensemble de plus de deux cent points d’échantillonnage, nous avons dosé les chromates avec une méthode colorimétrique spectrophotométrique : DR–2 HACH. Les nitrates ont été dosés avec réduction au cadmium au moyen du NITRAVER V où la précision est de 0,8 mg/L N–NO3– pour les fortes concentrations. Pour les faibles teneurs, la réduction est faite au NITRAVER VI : la lecture s’est faite à 500 nm et la précision de mesure est de 0,010 mg/L N–NO3–.
Étude de la vulnérabilité du système à la pollution
La pollution des eaux souterraines de la région d’El Ma El Abiod est d’origine essentiellement anthropique, industrielle, agricole et domestique.
Pollution d’origine industrielleAu cours de la dernière décennie, la région a connu un développement industriel important (( figure 3 )) et la pollution industrielle est provoquée par les rejets thermiques, chimiques et organiques par voies terrestres ou atmosphériques. Les unités industrielles qui sont des points potentiels ou réels de pollution peuvent être encore inventoriées. Étant donné la faiblesse de la profondeur du niveau piézométrique et la perméabilité élevée des sables, l’industrie constitue un foyer certain de dégradation de la qualité des eaux souterraines.Pollution d’origine agricole, domestique et urbaineLa polyculture représente plus de 50 % de l’ensemble de la superficie de la plaine d’El Ma El Abiod. Ces cultures sont soumises à des épandages intensifs d’engrais (riches en nitrates, phosphates et potassium) et de pesticides sous des formes de plus en plus inquiétantes, menaçant l’exploitation même de la nappe [3]. Il est à noter que les résultats d’analyses effectuées en juillet et octobre 2000 ont mis en évidence des concentrations en nitrates particulièrement élevées au centre et au sud de la région, respectivement de l’ordre de 95 et 120 mg/L. Ces résultats montrent une pollution par les nutriments, dont les origines sont probablement liées aux engrais utilisés dans la région en quantités importantes, en vue de fertiliser au maximum le sol.
Établissement de la carte de vulnérabilité
Caractéristiques lithologiques et piézométriquesL’étude géologique et le dépouillement des données des forages ont permis d’identifier un réservoir aquifère contenu dans les sables et grès du Miocène.L’établissement des cartes piézométriques permet de localiser les secteurs où la nappe est proche de la surface du sol, ce qui est nécessaire à l’établissement de la carte de vulnérabilité. Dans la plaine d’El Ma El Abiod, l’écoulement s’effectue essentiellement du nord vers le sud et de l’ouest vers l’est. Localement, se dessinent des zones de convergence formant ainsi des dépressions dues à la forte exploitation de la nappe aux environs de Bir El Baghdadi. Le contaminant arrive à la nappe à la faveur de l’écoulement à travers les formations supérieures du Quaternaire. Les mesures piézométriques de 1983 (75 puits), de 1994 (80 puits) et de 2000 (121 puits pour les campagnes de juillet et d’octobre) sur le système aquifère des sables miocènes montrent de faibles profondeurs dans la partie centrale et au sud de la plaine [4], ce qui implique un temps de transfert des polluants relativement court. La détermination des coefficients de perméabilité a été effectuée à partir de l’interprétation des données de pompages d’essais réalisés sur une trentaine de forages captant notamment les sables du Miocène. La carte établie (( figure 4 )) montre une zonation de perméabilité qui oscille entre 0,4.10–4 et 3,2.10–4 m/s. Caractéristiques chimiques des eauxL’analyse hydrochimique a montré la mauvaise qualité des eaux et l’existence d’une pollution se traduisant par un excès des teneurs en chlorures, sulfates, sodium et nitrates. Cette pollution peut avoir deux origines, l’une naturelle et l’autre anthropique. Pour déterminer l’origine des concentrations observées, nous avons utilisé une méthode statistique dite d’analyse en composante principale (ACP).Interprétation de l’ACPL’observation du cercle formé par les axes F1 et F2 (( figure 5 )) montre selon l’axe F1 une opposition entre les eaux faiblement minéralisées occupant la partie positive de l’axe et les eaux fortement minéralisées occupant sa partie négative. Selon l’axe F2, on note une opposition entre les eaux riches en silicates (Ca, SiO2) et les eaux riches en Cl–, NO3–, SO4– – et Na+. Cette répartition met en évidence deux origines des eaux : la première, endogène, est caractérisée par la présence de calcium et de silice liée aux sables de la région, alors que la deuxième est due à l’activité anthropique.Le graphe des individus nous permet de cartographier les eaux en fonction des éléments de pollution (( figure 6 )). Pour mettre en évidence l’influence de l’activité humaine sur la qualité de l’eau, nous allons procéder au calcul de l’indice de contamination. Indices de contaminationPour étudier la contamination des eaux de la nappe, nous avons utilisé un indice (IC =∑ [Na+]+[SO4– –]+[Cl–]+[NO3–]) utilisant l’ensemble des éléments chimiques considérés comme étant d’origine anthropique (tableau 1( Tableau 1 )). En admettant des intervalles de classes en mg/L pour chaque élément et en les additionnant, on peut repérer les indices de contamination [5]. Plus cet indice est élevé, plus le point de prélèvement est pollué. Dans le tableau 2( Tableau 2 ) les indices forts appartiennent géographiquement aux régions sud et nord–est, alors que les indices faibles appartiennent à la zone ouest, coïncidant parfaitement avec les secteurs où la nappe des sables est proche de la surface et sans couverture quaternaire. Les nouveaux périmètres irrigués et l’industrie en ces endroits font que le risque devient important.Tableau 1 Intervalle des classes pour les éléments de pollution.
Tableau 2 Calcul des indices de contamination.
I.C : indice de contamination.
Résultats
L’élaboration de la carte de vulnérabilité est basée sur la superposition de toute la cartographie de départ, à savoir la perméabilité, la
piézométrie, la lithologie, les éléments chimiques et les indices de contamination. La carte finale (( figure 7 )) permet de
visualiser une zonation selon le degré de vulnérabilité (fort, moyen et faible).
Zones de forte vulnérabilitéElles sont situées à l’aval de l’écoulement et localement dans la partie centrale de la plaine. En effet, le premier secteur constitue une zone de collecte où convergent toutes les eaux de la région. Ces eaux véhiculent la totalité des polluants accumulés au centre de la plaine. Les fortes teneurs en nitrates seront attribuées aux activités agricoles et à l’élevage, localisées en cet endroit.Zones de faible et moyenne vulnérabilitéDans ces zones situées à l’ouest et au nord de la plaine, le niveau piézomètrique dépasse 16 mètres, la couverture du sol retarde l’arrivée d’éventuels polluants à partir de la surface. Ainsi, la configuration de contact, verticale par drainance et horizontale par écoulement souterrain, fait que la nappe en aval est plus polluée que celles du nord et de l’ouest, qui se trouvent mieux protégées.
Conclusion
La plaine d’El Ma El Abiod abrite une nappe contenue dans des sables, d’importance capitale pour l’alimentation de la population locale, mais qui est mal
protégée contre la pollution originaire de la surface. Dans cette étude, une carte de vulnérabilité a été mise au point grâce aux analyses physico–chimiques réalisées sur près d’une
centaine de points avec le calcul d’un indice de contamination, et un suivi de la profondeur du plan d’eau de la nappe. Cette carte met en évidence trois zones de différents degrés de
pollution. La forte vulnérabilité est observée en aval des écoulements, ainsi qu’au niveau central, confirmant l’impact de l’industrie et de l’agriculture en cet endroit, où la perméabilité
est importante. Cette zone doit faire l’objet d’une réglementation de protection.
Remerciements
Les auteurs remercient le Professeur Messadi, directeur du Laboratoire pollution des eaux de l’université d’Annaba et le Professeur Jacky Mania de
l’École universitaire de lille (Eudil), France.
Références
1 Albinet M, et al. Cartographie de la vulnérabilité à la pollution des nappes d’eau souterraines. Bull BRGM (2) 1970 ; Section III (4) :
13-22.
2 Rouabhia A. Vulnérabilité des eaux souterraines d’une région semi–aride d’Algérie. Cas de la plaine d’El Ma El Abiod. Thèse de magister, université d’Annaba, 2001, 150 p. 3 Djabri L. Mécanisme de la pollution et vulnérabilité des eaux de la Sybouse. Origines géologiques, industrielles, agricoles et urbaines. Thèse de doctorat d’État, université d’Annaba, 1996 : 128–32. 4 Baali F, Latreche DJ. Approche hydrogéologique de la région d’El Ma El Abiod. Mémoire d’ingénieur de l’Institut des sciences de la terre (IST), université d’Annaba, 1994, 168 p. 5 Kherici N. Vulnérabilité à la pollution des eaux souterraines de la plaine de Annaba–la Mafragh, Algérie. Thèse de docteur–ès–sciences, université d’Annaba, 1993 : 120–5.
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